« Les États parties au présent Pacte s’engagent à respecter et à garantir à tous les
individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus
dans le présent Pacte, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe,
de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale
ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. ».

Dans son Observation générale no 31, qu’aux termes de cet article, tout État partie
doit respecter et garantir à quiconque se trouve sous son pouvoir ou son contrôle effectif
les droits reconnus dans le Pacte même s’il ne se trouve pas sur son territoire 14 . Cela
s’étend aux individus relevant de sa « compétence ».
Dans son rapport publié un an après le début des révélations d’Edward Snowden et
consacré au « droit à la vie privée à l’ère du numérique », le Haut-Commissariat des
Nations Unies aux droits de l’homme soulignait à propos de cette casuistique :
« Le Comité des droits de l’homme s’est appuyé sur le principe, énoncé même dans
sa jurisprudence la plus ancienne, qu’un État ne peut pas se soustraire à ses obligations internationales en matière de droits de l’homme en prenant en dehors de son
territoire des mesures qui lui seraient interdites « chez lui » 15 . Cette position est
conforme aux vues de la Cour internationale de Justice qui a affirmé que le Pacte
international relatif aux droits civils et politiques est applicable aux actes d’un État
agissant « dans l’exercice de sa compétence en dehors de son propre territoire » 16 ,
ainsi qu’aux articles 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.
Les notions de « pouvoir » et de « contrôle effectif » permettent de reconnaître
qu’un État exerce une « compétence » ou des pouvoirs publics, dont les mesures de
protection des droits de l’homme sont destinées à freiner les abus. Un État ne peut
pas se soustraire à ses responsabilités en matière de droits de l’homme simplement
en s’abstenant d’inscrire ces pouvoirs dans les limites de la loi. En tirant une autre
conclusion, non seulement on affaiblirait l’universalité et l’essence des droits protégés par le droit international des droits de l’homme mais l’on pourrait aussi inciter
structurellement les États à se déléguer mutuellement les tâches de surveillance.
34. Il s’ensuit que la surveillance numérique peut donc mettre en cause les obligations d’un État en matière de droits de l’homme si elle fait intervenir l’exercice du
pouvoir ou le contrôle effectif dudit État à l’échelle de l’infrastructure des communications numériques, où que cela se produise, par exemple sous la forme d’écoutes
directes ou d’une pénétration de l’infrastructure en place. De même, dans les cas où
l’État exerce une compétence réglementaire sur une tierce partie qui contrôle physiquement les données, cet État aura aussi des obligations en vertu du Pacte. Si un
pays souhaite établir sa compétence sur les données d’entreprises privées au motif
que ces entreprises ont été constituées en société sur son territoire, alors les protections des droits de l’homme doivent s’étendre aux personnes victimes d’immixtions
dans leur vie privée, que ce soit dans le pays où les sociétés ont été constituées ou
ailleurs. Cela reste valable que l’exercice de cette compétence soit légal ou non à
l’origine, ou viole de fait la souveraineté d’un autre État. »
14. Documents officiels de l’Assemblée générale des Nations Unies, 36ème session, Supplément no 40
(A/36/40), annexe XIX, §12.2.
15. Voir Documents officiels de l’Assemblée générale, trente-sixième session, (voir la note de bas de
page 27), annexe XIX, par. 12.2 et 12.3, et annexe XX, par. 10.3.
16. Avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur les conséquences juridiques de l’édification
d’un mur dans le territoire palestinien occupé, du 9 juillet 2004 (A/ES-10/273 et Corr.1), par. 107 à
111. Voir aussi Cour internationale de Justice, Activités armées sur le territoire du Congo (République
démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, 2005, p. 168.

79

Select target paragraph3