En effet, les systèmes de sonorisation et de captation peuvent être utilisés assez largement, en fonction des intérêts mentionnés à l’article L. 811-3. Or, ces différentes finalités
recouvrent des missions générales qui ne sauraient constituer des infractions telles qu’exigées par les juges du Conseil constitutionnel et de la CEDH. Une infraction doit réunir
trois éléments, soit un élément légal, un élement matériel et un élément moral. Or, pour
rappel, parmi les finalités pour lesquelles ce dispositif peut être utilisé, on trouve notamment :
1. Les intérêts majeurs de la politique étrangère, l’exécution des engagements européens et internationaux de la France et la prévention de toute forme d’ingérence
étrangère
2. Les intérêts économiques, industriels et scientifiques majeurs de la France
La loi devrait ainsi limiter le recours aux techniques de sonorisation à la sauvegarde
de certains intérêts fondamentaux et non pas à leur sauvegarde et à leur « promotion »
(Article L. 811-3). Egalement, les finalités portant sur les intérêts économiques, les violences collectives demeurent très imprécises et doivent ainsi être exclues. Clairement, ces
« finalités » ne comportent ni élément matériel, ni élément moral clairement définis par
la loi. Ces intérêts ne peuvent donc pas être qualifiés d’infractions. Ces finalités ne sauraient donc suffire à justifier le recours à de telles techniques sans constituer une atteinte
à l’inviolabilité du domicile et au droit de la défense.
Le seul fait de limiter le recours à ces procédés aux cas dans lesquels ils apparaîtraient
comme le seul moyen d’obtenir les renseignements est une limitation insuffisante, dès lors
que c’est le Premier ministre qui apprécie seul si la condition est remplie sans aucun
contrôle réel a priori ou a posteriori. La limitation temporelle est également inopérante
dès lors que leur renouvellement n’est pas limité en nombre.
En conclusion,
En l’absence d’indications sur la nature exacte des infractions pouvant conduire à
l’autorisation de mettre en œuvre des techniques de captation de paroles, d’images et
de données informatiques ; en autorisant d’une manière générale ces procédés, pour l’ensemble des finalités de l’article L. 811-3 et en ne les soumettant qu’à la procédure ordinaire
des articles L. 821-2 et suivants, la loi déférée porte une atteinte particulièrement grave
à la liberté personnelle au sens des articles 2, 4 et 8 de la Déclaration de 1789.
Les articles L. 853-1 et L. 853-2 créés par la loi déférée sont entachés d’incompétence
négative, le législateur ayant manqué à l’obligation d’assurer une juste conciliation entre
les intérêts poursuivis par la présente loi et le respect des droits et libertés fondamentaux
des citoyens. Ils doivent être censurés.
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