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leurs accès à Internet usuels (Free, Orange etc.). Toutefois, leurs
communications sont bien émises et reçues à l’étranger, puisque
chacun ne communique qu'à travers les serveurs du service de
messagerie situé à l’étranger et non pas directement l’un avec l’autre.
D’abord, l’auteur du courriel envoie un message depuis son ordinateur
vers son compte sur le serveur de messagerie. Une fois reçu, il est
copié sur ce même serveur vers l’espace alloué au compte du
destinataire. Pour récupérer ce message, ce dernier envoie une requête
au serveur pour en demander une copie vers son propre ordinateur. Il y
a donc trois étapes distinctes dans la communication : i) Un échange
du lieu d’envoi (en France) vers le lieu du serveur (à l’étranger) ; ii)
Un échange au sein du même serveur (à l’étranger) ; iii) Un échange
du lieu du serveur (à l’étranger) vers le lieu où se trouve le destinataire
(en France).
Dès lors, en vertu de l’article L. 854-8 du code de la sécurité
intérieure, la première et la troisième étapes peuvent faire l'objet d'une
collecte et d'une surveillance individuelle sans avis préalable de la
CNCTR, alors même qu'au plan matériel il s'agit bien d'une
communication strictement nationale (à ce sujet, v. l’amicus curiae
des associations requérantes, page 70, point 9.1 – Prod. 2 de la
requête introductive).
Plus encore, si les services de renseignement analysent une telle
communication comme impliquant uniquement un échange entre les
deux adresses de messagerie électronique – dont le contenu est stocké
dans le même serveur à l’étranger –, ces deux identifiants ne seront
alors pas rattachés à un territoire national et ne seront donc pas traités
comme rattachés au territoire français.
Plus largement encore, une telle interception et le stockage de données
sans égard pour l’exclusion prévue par l’article L. 854-1 du code de la
sécurité intérieure est d’autant plus envisageable que ces dispositions
– en particulier l'expression « lorsqu'il apparaît » – peuvent être
interprétées comme n’imposant pas une analyse technique
automatique préalable à toute opération de stockage ou d'exploitation
des données collectées pour isoler un numéro d'abonnement ou
identifiant technique rattachable au territoire français. Il y a d’ailleurs
lieu de souligner qu’une telle hypothèse est parfaitement
vraisemblable, puisque des communications peuvent aisément être