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l’existence d’un soupçon raisonnable à l’égard de la personne
concernée, en particulier de rechercher s’il existe des indices
permettant de la soupçonner de projeter, de commettre ou d’avoir
commis des actes délictueux ou d’autres actes susceptibles de donner
lieu à des mesures de surveillance secrète » (Cour. EDH, Gr. Ch., 4
décembre 2015, Zakharov c. Russie, Req. n°47143/06)
Par ailleurs, il n’est pas inutile de préciser que, selon la Cour de
justice, le caractère disproportionné de l’ingérence ainsi caractérisée
ne dépend nullement du fait que les renseignements collectés sont
ultérieurement exploités, car « pour établir l’existence d’une
ingérence dans le droit fondamental au respect de la vie privée, il
importe peu [...] que les intéressés aient ou non subi d’éventuels
inconvénients en raison de cette ingérence » (Digital Rights Ireland,
précité, § 33). En particulier, le simple fait que des renseignements
puissent être collectés « sans que l’abonné ou l’utilisateur inscrit en
soient informés est susceptible de générer dans l’esprit des personnes
[...] le sentiment que leur vie privée fait l’objet d’une surveillance
constante » (Ibid. § 37 ; en ce sens, v. Cour EDH, 4 décembre 2008, S.
et Marper c. Royaume-Uni, Req. n° 30562/04 et 30566/04, § 67).
XVIII-2 Or, en l’occurrence, les dispositions de l’article L. 851-3, I,
du code de la sécurité intérieure autorisent la mise en œuvre sur les
réseaux d'opérateurs de « traitements automatisés » qui recueillent des
informations
ou
documents
concernant
l'ensemble
des
communications transmises sur les réseaux ou serveurs concernés,
afin de « détecter des données susceptibles de caractériser l'existence
d'une menace à caractère terroriste ».
De la sorte, au moment du recueil de ces données, il n'existe
strictement aucun « lien, même indirect ou lointain » entre les
personnes concernées et l'existence d'une menace terroriste (cf. Digital
Rights Ireland, précité, § 58), puisque le but de ces traitements est
précisément d'établir un tel lien, afin que les services puissent ensuite
surveiller les personnes identifiées de façon plus ciblée et s'assurer de
leur lien effectif avec une menace terroriste.
De plus, bien que l'article L. 851-3 prévoit, à son paragraphe I, que,
dans un premier temps, ce traitement est réalisé « sans permettre
l'identification des personnes auxquelles les informations ou