CNCIS – ÉTUDES ET DOCUMENTS
« une base légale en droit suisse » et, dans l’affirmative, si cette dernière
était « accessible » (arrêt Leander précité). À cet égard, elle observe en effet
que les directives du Conseil fédéral du 16 mars 1981 étaient avant tout destinées au personnel de l’administration fédérale.
En l’espèce, cependant, elle n’estime pas nécessaire de se prononcer à ce sujet, puisqu’à supposer même que l’établissement de la fiche, en décembre
1981, fût fondé sur une base légale accessible, celle-ci n’était pas « prévisible ».
76. La Cour a jugé ci-dessus (paragraphes 58 et 59) que les articles 17 § 3
PPF et 1er de l’arrêté du Conseil fédéral du 29 avril 1958 concernant le Service de police du ministère public fédéral étaient rédigés en termes trop généraux pour satisfaire à l’exigence de prévisibilité en matière d’écoutes
téléphoniques. Pour les motifs déjà exposés, elle aboutit à la même conclusion concernant la création de la fiche sur le requérant.
Quant aux directives du Conseil fédéral du 16 mars 1981 applicables au traitement des données personnelles dans l’administration fédérale, elles énoncent quelques principes généraux, par exemple que le « traitement de
données personnelles doit reposer sur une base légale » ou que les « données
personnelles ne doivent être traitées que dans des buts bien déterminés »,
mais ne contiennent aucune indication appropriée sur l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir conféré au ministère public de recueillir, enregistrer et conserver des informations ; ainsi, elles ne précisent pas les
conditions d’établissement des fiches, les procédures à suivre, les informations pouvant être mémorisées et les mentions éventuellement interdites.
Ces directives, à l’instar de la loi fédérale sur la procédure pénale et l’arrêté
du Conseil fédéral du 29 avril 1958 concernant le Service de police du ministère public fédéral, ne sauraient en conséquence être considérées comme
suffisamment claires et détaillées pour assurer une protection adéquate
contre les ingérences des autorités dans le droit du requérant au respect de sa
vie privée.
77. L’établissement de la fiche concernant le requérant n’était donc pas
« prévu par la loi » au sens de l’article 8 de la Convention.
ii. La conservation de la fiche
78. La Cour souligne d’abord qu’il paraît douteux que la conservation d’une
fiche dont la création n’a pas été « prévue par la loi » puisse satisfaire à cette
exigence.
De surcroît, elle relève que le droit suisse et ce, tant avant qu’après 1990,
prévoit expressément la destruction des données qui ne s’avèrent plus « nécessaires » ou sont devenues « inutiles » (article 66 § 1 ter PPF, chiffre 414
des directives du Conseil fédéral du 16 mars 1981 applicables au traitement
des données personnelles dans l’administration fédérale et article 7 de l’arrêté fédéral du 9 octobre 1992 sur la consultation des documents du ministère public de la Confédération).
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