Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme

Or en l’espèce, les autorités n’ont pas détruit les renseignements mémorisés
lorsqu’il s’est avéré qu’aucune infraction n’était en cours de préparation,
comme le souligne le Tribunal fédéral dans son arrêt du 14 septembre 1994.
79. Pour ces motifs, la conservation de la fiche concernant le requérant
n’était pas « prévue par la loi » au sens de l’article 8 de la Convention.
80. La Cour conclut que tant l’établissement de la fiche litigieuse par le ministère public que la conservation de cette dernière dans le fichier de la Confédération constituent des ingérences dans la vie privée du requérant qui ne
sauraient passer pour « prévues par la loi » puisque le droit suisse n’indique
pas avec assez de clarté l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir
d’appréciation des autorités dans le domaine considéré. Il s’ensuit qu’il y a
eu violation de l’article 8 de la Convention.
b) finalité et nécessité de l’ingérence
81. Eu égard à la conclusion qui précède, la Cour n’estime pas nécessaire
d’examiner le respect des autres exigences du paragraphe 2 de l’article 8.
III. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 13 DE LA
CONVENTION
82. Le requérant allègue en outre une violation de l’article 13 de la Convention, ainsi libellé :
« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (...) Convention
ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes
agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. »
(...)
B. Sur le bien-fondé du grief
(...)
89. En l’espèce, la Cour relève que le requérant a été en mesure de consulter
sa fiche dès qu’il en a fait la demande, en 1990, lorsque la population dans
son ensemble eut connaissance de l’existence du fichier du ministère public.
Elle souligne en outre que le requérant a intenté une action de droit administratif devant le Tribunal fédéral et qu’à cette occasion, il a été en mesure de
se plaindre de ce que la surveillance téléphonique et la rédaction de la fiche
ne reposaient pas sur une base légale, d’une part, et de l’absence de « recours
effectif » contre ces mesures, d’autre part. Elle note que le Tribunal fédéral
avait compétence pour se prononcer sur ces griefs et a procédé à leur examen ; à cet égard, elle rappelle que le seul fait que le requérant soit débouté
de toutes ses conclusions ne constitue pas en soi un élément suffisant pour
juger du caractère « effectif » ou non de l’action de droit administratif.
90. Le requérant a donc disposé, en droit suisse, d’un recours effectif pour
exposer les violations de la Convention qu’il alléguait. Partant, il n’y a pas
eu violation de l’article 13.

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