CNCIS – ÉTUDES ET DOCUMENTS

67. Pour la Cour, il s’agit là sans contredit de données relatives à la « vie
privée » du requérant et l’article 8 trouve en conséquence à s’appliquer à ce
grief également.
B. Observation de l’article 8
1. Sur l’existence d’une ingérence
68. Pour le Gouvernement, la question de savoir s’il y a eu « ingérence » au
sens de l’article 8 de la Convention demeure posée, puisque « la fiche ne
contenait aucun élément sensible en rapport avec la vie privée du requérant », que ce dernier « n’a subi aucun inconvénient du fait de l’établissement et de la conservation de la fiche » et que celle-ci n’a « très
probablement jamais été consultée par des tiers ».
69. La Cour rappelle que la mémorisation par une autorité publique de données relatives à la vie privée d’un individu constitue une ingérence au sens
de l’article 8. L’utilisation ultérieure des informations mémorisées importe
peu (voir, mutatis mutandis, arrêts Leander précités).
70. En l’espèce, la Cour relève qu’une fiche contenant des données relatives
à la vie privée du requérant a été établie par le ministère public, puis
conservée dans le fichier de la Confédération. À cet égard, elle souligne
qu’il ne lui appartient pas de spéculer sur le caractère sensible ou non des
éléments recueillis ni sur les éventuels inconvénients subis par le requérant.
Il lui suffit de constater que des données relatives à la vie privée d’un particulier ont été mémorisées par une autorité publique pour conclure qu’en
l’espèce, l’établissement et la conservation de la fiche litigieuse constituent
une ingérence, au sens de l’article 8, dans le droit au respect de la vie privée
du requérant.
2. Justification de l’ingérence
71. Pareille ingérence méconnaît l’article 8 sauf si, « prévue par la loi », elle
poursuit un ou des buts légitimes au regard du paragraphe 2 et, de surcroît,
est nécessaire dans une société démocratique pour atteindre ces derniers.
a) L’ingérence était-elle « prévue par la loi » ?
72. Selon le requérant, l’établissement et la conservation de la fiche le
concernant sont des mesures qui ne reposent pas sur une base légale. En particulier, il affirme que l’article 17 § 3 PPF n’autorise pas la police fédérale à
consigner les résultats de ses mesures de surveillance. Quant aux directives
du Conseil fédéral du 16 mars 1981 applicables au traitement des données
personnelles dans l’administration fédérale, elles sont destinées aux fonctionnaires de l’administration et il ne s’agit donc pas d’une loi suffisamment
claire et précise pour permettre aux citoyens de déterminer leurs droits et
obligations.
Il soutient que de surcroît, les autorités ne se sont pas conformées aux normes en vigueur, puisque l’article 66 § 1 ter PPF et le chiffre 414 des directives du Conseil fédéral du 16 mars 1981 applicables au traitement des

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