Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme
rappeler qu’il était admissible de recueillir des informations afin de prévenir
des infractions contre l’État ou la défense nationale lorsque des éléments
donnaient à penser que les préparatifs d’une telle infraction étaient en cours.
53. Il est vrai que la Cour s’est déjà prononcée sur la question de savoir si la
loi fédérale sur la procédure pénale constituait, en droit suisse, une base légale suffisante en matière d’écoutes téléphoniques (arrêt Kopp). À la différence de la présente affaire, toutefois, l’autorité alors saisie par M Kopp (le
Conseil fédéral) avait examiné de manière détaillée la question de la légalité
de la surveillance et l’article 72 PPF n’était pas en cause.
54. En l’espèce, la Cour n’estime pas nécessaire de rechercher si l’interception de l’appel téléphonique du 12 octobre 1981 reposait sur une base légale.
En effet, à supposer même que tel fût le cas, l’une des exigences découlant
de l’expression « prévue par la loi », en l’occurrence la prévisibilité, ne se
trouve pas réalisée.
ii. Qualité de la loi
55. La Cour rappelle que les mots « prévue par la loi » impliquent des conditions qui vont au-delà de l’existence d’une base légale en droit interne et exigent que celle-ci soit « accessible » et « prévisible ».
56. Selon la jurisprudence constante de la Cour, une norme est « prévisible »
lorsqu’elle est rédigée avec assez de précision pour permettre à toute personne, en s’entourant au besoin de conseils éclairés, de régler sa conduite
(arrêt Malone c. Royaume Uni). En matière de mesures de surveillance secrète, la Cour a souligné l’importance de ce concept en ces termes :
« La Cour rappelle qu’à ses yeux le membre de phrase « prévue par la loi »
ne se borne pas à renvoyer au droit interne, mais concerne aussi la qualité de
la « loi » ; il la veut compatible avec la prééminence du droit, mentionné
dans le préambule de la Convention (). Il implique ainsi – et cela ressort de
l’objet et du but de l’article 8 – que le droit interne doit offrir une certaine
protection contre des atteintes arbitraires de la puissance publique aux droits
garantis par la paragraphe 1 (). Or le danger d’arbitraire apparaît avec une
netteté singulière là où un pouvoir de l’exécutif s’exerce en secret (...)
(...) Puisque l’application de mesures de surveillance secrète des communications échappe au contrôle des intéressés comme du public, la « loi » irait à
l’encontre de la prééminence du droit si le pouvoir d’appréciation accordé à
l’exécutif ne reconnaissait pas de limites. En conséquence, elle doit définir
l’étendue et les modalités d’exercice d’un tel pouvoir avec uns netteté suffisante – compte tenu du but légitime poursuivi – pour fournir à l’individu une
protection adéquate contre l’arbitraire » .
Elle a aussi précisé que les écoutes et autres formes d’interceptions des entretiens téléphoniques « représentent une atteinte grave au respect de la vie
privée et de la correspondance. Partant, elles doivent se fonder sur une loi »
d’une précision particulière. L’existence de règles claires et détaillées en la
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