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économique » des États-Unis, elle incitait l’appareil du renseignement à suivre
l’évolution de la situation politique, économique, sociale et militaire dans les
parties du monde où les intérêts américains étaient le plus engagés. Et depuis 2004,
le département du Trésor dispose d’un service de renseignement dédié : l’Office of
Intelligence and Analysis.
Malheureusement, une telle structuration paraît en France hautement
improbable, l’usage du renseignement à des fins de politique publique étant perçu,
notamment par la direction générale du Trésor, comme une tentation
protectionniste. Plus largement, le ministère semble imprégné d’une philosophie
qui répugne à utiliser le renseignement économique et financier comme instrument
de puissance.
La déconsidération qui frappe le REF impose donc une volonté politique
constante et réaffirmée, un pilotage permanent en fonction d’objectifs établis et
dont la réalisation est considérée comme prioritaire. Mais l’intérêt des responsables
politiques s’avère fluctuant et l’inertie administrative guette toute bonne initiative.
• En dépit de ces considérations, le ministère « consomme » curieusement
une grande quantité de renseignement. Or cet usage ne va pas sans susciter nombre
de paradoxes et soulève de réels problèmes d’organisation.
- En premier lieu, il est surprenant de constater que les ministères
financiers reçoivent et exploitent peu de renseignement produit par leurs propres
services spécialisés. Tracfin ne collabore en effet qu’avec la direction générale des
finances publiques (DGFIP) ou avec les douanes (DGDDI), tandis que la DNRED
est quasi exclusivement tournée vers son autorité de tutelle.
- Par ailleurs, si les cabinets des ministres reçoivent des notes émanant
de divers services de la communauté du renseignement (la plupart étant transmises
de manière spontanée dans la mesure où peu de demandes sont en ce domaine
formulées), ils n’organisent pas la diffusion de ces notes aux directions qui
pourraient être intéressées par elles.
- De fait, il règne une grande inégalité dans l’accès au
renseignement entre les directions : la Direction générale des entreprises (DGE) et
la DG Trésor semblent privilégiées grâce aux relations bilatérales principalement
nouées avec la DGSE, ***. En outre, la DGDDI reçoit des notes de la DGSE et de
Tracfin enrichies par le soin de la DNRED, son service de renseignement. Ainsi,
les rares notes proposées par la DGSI ne rencontrent-elles guère le lectorat qu’elles
méritent, notamment dans le domaine de la sécurité économique puisque seule la
direction nationale d’enquêtes fiscales (au sein de la DGFIP) entretient des
relations suivies avec le service de renseignement intérieur. Ces relations sont
bénéfiques et doivent être approfondies, comme l’a énoncé un référé de la Cour des
Comptes en date du 1er août 2013 qui appelait à juste titre à un renforcement de la
recherche et de la coordination du renseignement dans le cadre de la lutte contre la