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B. UNE PRISE EN CHARGE CONTRASTÉE DU REF PAR LES SERVICES DE
RENSEIGNEMENT
1. Tracfin : un service aux potentialités inexploitées
Créé en 1990 et originellement rattaché à la direction générale des douanes
et droits indirects (DGDDI), Tracfin est devenu en 2006 un service à compétence
nationale et en 2007, par voie d’amendement parlementaire, un service de
renseignement. Cette intégration quelque peu fortuite n’a pas gommé le caractère
original de cette administration au sein de la communauté du renseignement.
À ce titre, et à la différence de ses homologues de la communauté du
renseignement, l’intégralité de sa structure est publique et disponible sur le site
internet du ministère53. De même, le service publie un épais et détaillé rapport
annuel d’activité. Ainsi apprend-on qu’il dispose, en 2014 de 104 ETPT, pour un
budget de 9,7 millions d’euros.
En outre, si sa mission première consiste dans la lutte contre les circuits
financiers clandestins, le blanchiment de l’argent et le financement du terrorisme,
son action peut être uniquement déclenchée à la suite de déclarations effectuées par
des professionnels assujettis (banques, professions juridiques dont la liste est
établie par le code monétaire et financier), par les cellules de renseignement
financier étrangères ou par les administrations françaises partenaires. Particularité
supplémentaire, il ne dispose donc pas de la capacité d’effectuer des enquêtes
spontanées.
Il est alors logique que son activité soit en partie tournée vers l’autorité
judiciaire. En 2013, sur 1326 notes d’information produites, 458 étaient destinées à
l’autorité judiciaire (soit 34,5 %) contre 868 aux administrations. Sur ces 868 notes,
17 % étaient destinés aux services de police judiciaire contre 41 % aux
administrations chargées de la fraude fiscale et 31 % aux services de
renseignement. De telle sorte que si l’on cumule les notes transmises à l’autorité
judiciaire et aux services de police judiciaire, près de 45 % de la production
officielle de Tracfin est tournée vers le monde judiciaire contre 20 % au profit des
services de renseignement (même si le rapport 2013 signale une forte hausse en ce
domaine qui traduit une évolution plus globale dans la mesure où, à l’origine, le
service était exclusivement tourné vers le monde judiciaire). Bien évidemment, ce
chiffre ne saurait à lui seul offrir une représentation complète de l’activité de
Tracfin ***.
Toutefois, au sein de la communauté du renseignement, la DPR constate
que ce tropisme judiciaire ne va pas sans susciter des réticences, des craintes
(notamment en raison du nécessaire respect de la règle du tiers service *** Pour
autant, ces derniers arguments n’emportent pas la conviction de la Délégation : au
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