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serait donc judicieux de réfléchir à une évolution dans l’intérêt même du contrôle
parlementaire.
D. UNE EXTENSION MODÉRÉE DES CAPACITÉS D’AUDITION
Comme l’écrit M. Olivier Duhamel, « pour contrôler, il faut savoir. Pour
savoir, il faut être informé. Pour être informé, le député peut interroger. »31 Et en
la matière, si les pouvoirs d’audition de la DPR ont été élargis, leur extension est
restée très maîtrisée, ce qui demeure un regret.
L’article 12 de la LPM prévoit ainsi que « la délégation peut entendre le
Premier ministre, les ministres compétents, le secrétaire général de la défense et de
la sécurité nationale, le coordonnateur national du renseignement, le directeur de
l’Académie du renseignement ainsi que les directeurs en fonction des services
spécialisés de renseignement […]. Les directeurs de ces services peuvent se faire
accompagner des collaborateurs de leur choix en fonction de l’ordre du jour de la
délégation. La délégation peut également entendre les directeurs des autres
administrations centrales ayant à connaître des activités des services spécialisés de
renseignement. »
Ces dispositions officialisent d’abord l’existant. Ainsi le coordonnateur
national du Renseignement, qui était jusqu’à présent uniquement mentionné à
l’article R*1122-8 du code de la défense, trouve ici une reconnaissance légale. Pour
autant, son audition ne va pas sans soulever, aux yeux de la DPR, certains
problèmes de constitutionnalité.
En effet, aux termes du décret fondateur n° 2009-1657 du 24 décembre
2009, « le coordonnateur national du renseignement conseille le Président de la
République dans le domaine du renseignement ». Il est donc parfaitement
soutenable d’avancer la thèse selon laquelle son audition systématique serait
susceptible de remettre en cause l’irresponsabilité parlementaire du chef de l’État
(en sus des autres problèmes de constitutionnalité soulevés par cette fonction32).
Aussi l’idée de le rattacher tant à l’Élysée qu’à Matignon se révèle-t-elle séduisante
(en le nommant par exemple conseiller renseignement du Premier ministre à
l’image de la pratique observable pour le secrétaire général aux affaires
européennes qui dépend administrativement des services du Premier ministre mais
occupe également les fonctions de conseiller affaires européennes au cabinet du
Président de la République). Comment continuer à ignorer son rattachement pour le
moins baroque ? Ainsi, selon le décret n° 2010-299 du 22 mars 2010, le
coordonnateur et son équipe relèvent « pour [leur] gestion administrative et
financière » du Secrétariat général du gouvernement, donc du Premier ministre,
alors même que le Président de la République est le principal bénéficiaire de leur
31
32
Olivier Duhamel, Droit constitutionnel, Paris, Seuil, col. Essais, édition de 1999, p. 282.
Sur ce point, se reporter au rapport précité, Pour un « État secret » au service de notre démocratie, p. 105.