En conclusion,
L’article L. 881-1 doit faire l’objet d’une réserve d’interprétation explicitant le fait qu’il
s’applique uniquement dans les cas où la divulgation d’informations relatives aux activités
de surveillance secrète, et notamment à l’existence ou à l’exécution d’une technique de
renseignement, viole non seulement le secret de la défense nationale mais qu’une telle
violation n’est par ailleurs pas justifiée par le caractère d’intérêt public des informations
révélées (auquel cas une sanction proportionnée au préjudice occasionné pour l’État est
légitime).
À l’article L. 833-4 du code de la sécurité intérieure relatif au rapport d’activité de
la CNCTR, une réserve d’interprétation doit ainsi être faite pour imposer la mention
dans ce rapport du nombre d’avis non conformes émis par cette dernière ainsi que du
nombre de mesures liées aux techniques de renseignement reconnues comme illégales par
le Conseil d’État, en précisant les personnes visées et les techniques employées.
Sous ces réserves seulement, ces dispositions sont conformes à la Constitution.
11.2. Le contrôle a posteriori de la CNCTR est inopérant
Le contrôle réalisé a posteriori par la CNCTR défini aux articles L. 833-1 et suivants
doit permettre à la CNCTR de faire cesser, à un stade pré-contentieux, des atteintes
illégales constatées, à défaut d’avoir pu les prévenir en amont. Or, l’effectivité de ce
contrôle n’est pas assurée. 7 .
11.2.1. Un contrôle trop restreint puisqu’il ne concerne pas les
opérations non-autorisées
En effet, l’article L. 822-1 du code de la sécurité intérieure prévoit que « le Premier
ministre organise la traçabilité de la mise en œuvre des techniques autorisées [...] et définit les modalités de la centralisation des renseignements collectés. » Au regard de quoi
l’article L. 833-2, 2o du même code prévoit que « pour l’accomplissement de ses missions, la commission [...] dispose d’un accès permanent, complet et direct aux relevés,
registres, renseignements collectés, transcriptions et extractions mentionnés au présent
livre, à l’exception de ceux mentionnés à l’article L. 854-1, ainsi qu’aux dispositifs de traçabilité des renseignements collectés et aux locaux où sont centralisés ces renseignements
en application de l’article L. 822-1 ».
Concrètement, le contrôle de la légalité des techniques exige pour la CNCTR de pouvoir vérifier que les services de renseignement n’ont collecté aucune information correspondant à d’autres objectifs que ceux invoqués pour en autoriser la collecte, concernant
une autre personne que celle visée par cette autorisation ou dont le délai de conservation est expiré. Ces vérifications, réalisées le cas échéant au cours de contrôles
inopinés, exigent que la CNCTR ait accès non pas seulement aux registres
7. Pour rappel, le contrôle a posteriori des mesures de surveillance internationale fait l’objet de
développements à la section 9.3.3 page 75
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