Pour autant, le chapitre en question (chapitre premier du titre V) ne traite que des
« accès administratifs aux données de connexion », laissant ainsi de côté un grand nombre
de techniques de renseignement ainsi que de nombreuses autres infractions sanctionnant
des atteintes à la vie privée.
À rebours de ce que laisse penser la lecture du seul article L. 851-10, il est certes
possible d’interpréter la loi de sorte que l’ensemble des infractions protectrices de la vie
privée et du secret des correspondances incluses dans le code pénal soient indirectement
couvertes par l’article L. 801-1, lequel dispose :
« Le respect de la vie privée, dans toutes ses composantes, notamment le secret des
correspondances, la protection des données personnelles et l’inviolabilité du domicile,
est garanti par la loi. L’autorité publique ne peut y porter atteinte que dans les seuls
cas de nécessité d’intérêt public prévus par la loi, dans les limites fixées par celle-ci et
dans le respect du principe de proportionnalité ».

Hélas, une telle interprétation n’est pas explicite.
Surtout, bien d’autres abus potentiels — liés par exemple à des cas de corruption active
(article L. 433-1 du code pénal) au sein des services de renseignement — resteraient alors
hors du champ de cette procédure d’alerte. Il est donc nécessaire d’élargir le champ
des infractions couvertes par l’article L. 855-3 en visant, outre le livre VIII
du code de la sécurité intérieure, l’ensemble des crimes et délits.
Toutefois, l’article L. 855-3 risquerait alors de paraître antagoniste des dispositions de
l’article 40 du code de procédure pénale. Ce dernier prévoit notamment que :
« Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de
ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner
avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les
renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs ».

Il importe de rappeler à cet égard que le respect de cette obligation qui incombe aux
agents de la fonction publique est particulièrement délicat dans le cadre des activités
de renseignement. En effet, un agent qui porte à la connaissance du procureur de tels
crimes et délits s’exposera le plus souvent à des poursuites pour violation du secret de
la défense nationale. Dès lors, en parallèle de l’élargissement de l’article L. 855-3 à tout
crime ou délit, les lanceurs d’alerte doivent être immunisés contre l’application de l’article
40 du code de procédure pénale lorsqu’ils rapportent des faits à la seule CNCTR sans les
porter à la connaissance du procureur. Le procureur devra alors être avisé par le Conseil
d’État, lequel sera saisi sans délai par la CNCTR dès qu’elle constate ou est informée de
la commission d’illégalités ou de faits susceptibles de constituer des infractions pénales
(tel que défendu infra, section 11.2.2 page 111). Le Conseil d’État devra également être
« Le fait, commis de mauvaise foi, d’ouvrir, de supprimer, de retarder ou de détourner des
correspondances arrivées ou non à destination et adressées à des tiers, ou d’en prendre
frauduleusement connaissance, est puni d’un an d’emprisonnement et de 45000 euros
d’amende.
« Est puni des mêmes peines le fait, commis de mauvaise foi, d’intercepter, de détourner,
d’utiliser ou de divulguer des correspondances émises, transmises ou reçues par la voie
des télécommunications ou de procéder à l’installation d’appareils conçus pour réaliser
de telles interceptions. »

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