Compte-rendu
de l’activité
de la CNCTR
nationale46 », considérant par ailleurs que la Convention n’interdit pas
aux États de recourir à de tels régimes d’interception pour protéger
leurs intérêts nationaux essentiels et que les États jouissent à cet égard
d’une large marge d’appréciation pour déterminer le type de régime
d’interception dont ils ont besoin. Eu égard à l’atteinte qu’un tel dispositif
est susceptible de porter au droit au respect de la vie privée, ce régime
doit toutefois, selon la Cour, être encadré par des « garanties de bout en
bout ». La nécessité et la proportionnalité des mesures prises doivent en
particulier être appréciées, au niveau national, à chaque étape du processus
de sa mise en œuvre. Il faut, en outre, que l’interception en masse soit
soumise à une autorisation d’une autorité « indépendante » dès le départ,
c’est-à-dire lors de la définition de l’objet et de la portée de l’opération
d’interception, puis que cette opération soit placée, a posteriori, sous
la supervision et le contrôle d’un organisme indépendant. Ces éléments
sont, de l’avis de la Cour, « des garanties fondamentales, qui constituent
la pierre angulaire de tout régime d’interception en masse conforme
aux exigences de l’article 8 de la Convention »47.
Pour vérifier que le cadre juridique en litige contient des garanties
suffisantes contre d’éventuels abus et que le dispositif concerné est
assujetti à des « garanties de bout en bout », la Cour a dégagé de nouveaux
critères, venant compléter les six garanties « minimales » énoncées dans
sa jurisprudence antérieure48. Elle recherche en particulier si le cadre
juridique national définit clairement :
1. Les motifs pour lesquels l’interception en masse peut être autorisée ;
2.
Les circonstances dans lesquelles les communications d’un
individu peuvent être interceptées ;
3. La procédure d’octroi d’une autorisation ;
4. Les procédures à suivre pour la sélection, l’examen et l’utilisation
des éléments interceptés ;
46 - Voir le point 424 de l’arrêt Big Brother Watch.
47 - Voir le point 350 de l’arrêt Big Brother Watch
48 - La Cour a déterminé que pour prévenir les abus de pouvoir, la loi doit au minimum énoncer les éléments suivants : 1) la nature
des infractions susceptibles de donner lieu à un mandat d’interception ; 2) la définition des catégories de personnes dont les
communications sont susceptibles d’être interceptées ; 3) la limite à la durée d’exécution de la mesure ; 4) la procédure à suivre pour
l’examen, l’utilisation et la conservation des données recueillies ; 5) les précautions à prendre pour la communication des données à
d’autres parties ; 6) les circonstances dans lesquelles les données interceptées peuvent ou doivent être effacées ou détruites.
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