Compte-rendu
de l’activité
de la CNCTR
trafic et des données de localisation de tous les abonnés et utilisateurs
inscrits concernant tous les moyens de communication électronique ».
Cet arrêt condamnait ainsi potentiellement les législations de tous les
États membres obligeant les opérateurs de communications électroniques
et les fournisseurs de services en ligne à conserver, même pendant une
durée limitée, des données de connexion de tous leurs abonnés, en
vue de leur éventuelle réquisition par l’autorité judiciaire, par diverses
autorités administratives investies de pouvoirs d’enquête13 ou encore par
les services de renseignement.
Eu égard aux difficultés soulevées, tant pour la conduite des enquêtes
judiciaires que pour la recherche de renseignement, l’arrêt a suscité
des inquiétudes parmi les autorités et professionnels concernés dans la
plupart des États membres.
En France, plus de 2 millions de réquisitions judiciaires transitent
chaque année par la plateforme nationale des interceptions judiciaires14,
auxquelles les opérateurs de téléphonie mobile et les fournisseurs d’accès
à Internet répondent le plus souvent en quelques minutes, pour les
besoins de plus de quatre enquêtes judiciaires sur cinq et, parmi elles,
de 100 % des investigations en matière de criminalité et délinquance en
bande organisée. Ce sont aussi plus de 50 000 demandes des services de
renseignement autorisées par le Premier ministre après avis de la CNCTR,
donnant lieu à la réquisition de centaines de milliers de données par
l’intermédiaire du Groupement interministériel de contrôle (GIC)15 aux
fins de défendre et promouvoir les intérêts fondamentaux de la Nation16.
13 - Telles que l’administration fiscale ou la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI),
intégrée au sein de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) depuis le 1er janvier 2022.
14 - S
elon les chiffres communiqués par le Gouvernement, 1,8 millions en 2017, 2,2 millions en 2018, 2,4 millions en 2019
et 2,5 millions en 2020.
15 - Le GIC est un service à compétence nationale du Premier ministre chargé de centraliser les demandes d’autorisation de mise en œuvre
des techniques de renseignement. Il a l’exclusivité de la relation avec les opérateurs de communications électroniques et les fournisseurs
de services sur Internet pour recueillir les données que ces derniers traitent, en application des autorisations prononcées. Il met ensuite ces
données à la disposition des services de renseignement grâce à un maillage territorial étendu et contrôle leur exploitation.
16 - Il s’agit des intérêts fondamentaux énumérés par l’article L. 811-3 du code de la sécurité intérieure, à savoir : 1° l’indépendance
nationale, l’intégrité du territoire et la défense nationale ; 2° les intérêts majeurs de la politique étrangère, l’exécution des engagements
européens et internationaux de la France et la prévention de toute forme d’ingérence étrangère ; 3° les intérêts économiques,
industriels et scientifiques majeurs de la France ; 4° la prévention du terrorisme ; 5° la prévention : a) des atteintes à la forme
républicaine des institutions ; b) des actions tendant au maintien ou à la reconstitution de groupements dissous en application de
l’article L. 212-1 ; c) des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique ; 6° la prévention de la
criminalité et de la délinquance organisées ; 7° la prévention de la prolifération des armes de destruction massive.
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