— 27 —

b. Des précisions et des réserves apportées par la jurisprudence
constitutionnelle
Le Conseil constitutionnel est intervenu à plusieurs reprises en matière de
droit des fichiers pour formuler des réserves d’interprétation ou pour constater une
inconstitutionnalité dont l’effet a toutefois été repoussé dans le temps.
Saisi de la conformité à la Constitution des articles 706-54 à 706-55 du
code de procédure pénale, le Conseil constitutionnel a formulé, dans sa
décision n° 2010-25 QPC du 16 septembre 2010, une réserve d’interprétation
portant sur la fixation de la durée de conservation des empreintes au fichier
national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Il a jugé qu’il
appartenait au pouvoir réglementaire, compte tenu de l’objet du fichier, de
proportionner la durée de conservation de ces données personnelles à la nature ou
à la gravité des infractions concernées tout en adaptant ces modalités aux
spécificités de la délinquance des mineurs. Des durées excessives seraient
sanctionnées par le juge administratif. Le décret supposé moduler ainsi la durée de
conservation au FNAEG n��a pas vu le jour pour l’instant.
Les rapporteurs relèvent aussi que le Conseil constitutionnel a jugé, dans
une décision n° 2017-670 QPC du 27 octobre 2017, qu’en privant les personnes
mises en cause dans une procédure pénale, autres que celles ayant fait l’objet
d’une décision d’acquittement, de relaxe, de non-lieu ou de classement sans suite,
de toute possibilité d’obtenir l’effacement de leurs données personnelles inscrites
dans le fichier des antécédents judiciaires (TAJ), les dispositions de l’article 230-8
du code de procédure pénale portaient une atteinte disproportionnée au droit au
respect de la vie privée. La loi du 20 juin 2018 relative à la protection des données
personnelles a modifié l’article 230-8 afin de tenir compte de cette jurisprudence.
c. La prise en compte du droit européen
Dans un arrêt Brunet du 18 septembre 2014 (1), la Cour européenne des
droits de l’homme a jugé que le régime de conservation des données inscrites au
Système de traitement des infractions constatées (STIC) qui, pour une personne
ayant bénéficié d’un classement sans suite, prévoyait une durée de conservation de
la fiche de vingt ans et n’offrait pas de possibilité réelle de demander l’effacement
des données, violait l’article 8 de la convention de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales, relatif au droit au respect de la vie privée.
De même, dans un arrêt Aycaguer du 22 juin 2017 (2), la Cour européenne
des droits de l’homme a jugé que le régime français de conservation des profils
ADN dans le FNAEG n’offrait pas, en raison tant de sa durée (quarante ans
maximum en cas de condamnation) que de l’absence de possibilité d’effacement
pour les personnes condamnées (l’effacement n’étant prévu que pour les
personnes soupçonnées), une protection suffisante à la personne concernée et
(1) Cour européenne des droits de l’homme, 5ème section, Affaire Brunet c. France, requête n° 21010/10.
(2) Cour européenne des droits de l’homme, 5ème section, Affaire Aycaguer c. France, requête n° 8806/12.

Select target paragraph3