NOR : INTD2107675L/Verte-2
5 sur 15
10.
Le projet envisage de substituer à la condition posée par les articles L. 229-1, L. 229-4
et L. 229-5 d’existence d’une menace d’une « particulière gravité » pour procéder à des
visites domiciliaires et à leur occasion à diverses opérations de saisie ou de retenue, celle de
menace « grave ». Sans méconnaître la portée de la garantie qui résulte de l’appréciation de la
condition de gravité par le juge des libertés et de la détention, le Conseil d’État constate que le
Conseil constitutionnel n’a admis la constitutionnalité des dispositions relatives aux visites
domiciliaires (Décisions n° 2017-691 QPC du 16 février 2018 et n° 2017-695 QPC du
29 mars 2018 ct 59) qu’en relevant que le législateur les avait soumises, entre autres
conditions, à l’exigence d’une menace d’une « particulière gravité ». Le Conseil d’État ne
retient pas en conséquence cette disposition.
En revanche la possibilité nouvelle donnée par le texte de saisir, lors d’une visite
domiciliaire, les matériels lorsque la personne concernée fait obstacle à l’accès des enquêteurs
aux données qu’ils renferment, est assortie de l’ensemble des garanties résultant du contrôle
par le juge des libertés et de la détention de l’emploi des matériels ainsi saisis, prévues au II
de l’article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure. Le Conseil d’Etat considère que cette
disposition répond à une nécessité opérationnelle et n’appelle pas de réserve.
Code de procédure pénale
Création d’une « mesure judiciaire de réinsertion sociale antiterroriste »
11.
Le projet introduit dans le code de procédure pénale six nouveaux articles 706-25-16 à
706-25-22 régissant le prononcé d’une « mesure judiciaire de réinsertion sociale
antiterroriste ».
Comme il a été dit au point 8, le législateur a adopté sur la base d’une proposition de
loi examinée par le Conseil d’État, la possibilité de prononcer une mesure de sûreté spécifique
comportant une ou plusieurs des douze obligations définies dans le texte (telles que résidence,
interdiction de paraître, obligation de présence, présentation périodique aux services de
police, autorisation pour déplacement à l’étranger, suivi d’un enseignement ou d’une
formation professionnelle, respect des conditions d’une prise en charge sanitaire ou sociale
demande d’autorisation de travail…) prononcée par la juridiction régionale des mesures de
sûreté pour des sortants de prison condamnés pour faits de terrorisme. Le Conseil d’État avait
émis un avis favorable sur le projet, dont il avait admis la nécessité, notamment au regard du
fait que le suivi socio-judiciaire n’est pas applicable aux auteurs d’infractions terroristes
commises avant la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, tout en proposant un nouvel équilibre à la
mesure: il avait suggéré qu’elle soit mieux articulée avec l’ensemble des dispositifs existants,
que l’objectivation de la dangerosité de la personne concernée soit mieux assurée, que les
obligations imposées puissent à tout moment être modifiées ou supprimées et que la mesure
soit limitée la durée à cinq ans. Le législateur avait en grande partie tenu compte de ces
propositions.
Toutefois, par sa décision n° 2020-805 DC du 7 aout 2020, le Conseil constitutionnel,
après avoir relevé que la mesure, qui repose non sur la culpabilité de la personne condamnée
mais sur sa particulière dangerosité et a pour but d’empêcher et de prévenir la récidive, n’est
ni une peine ni une sanction ayant le caractère de punition, mais une mesure de sûreté, et
qu’en l’adoptant le législateur a « comme il y était fondé , voulu lutter contre le terrorisme et
prévenir la commission d’actes troublant gravement l’ordre public », a censuré le dispositif.
Il a jugé que s’il est loisible au législateur de prévoir une mesure de sûreté fondée sur la