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Comme on l’a vu en première partie du rapport, la loi du 24 juillet 2015
est une loi de principe. Il existe cependant un débat sur son degré de technodépendance. Plusieurs interlocuteurs de la mission ont insisté sur la nécessité de
maintenir une neutralité technologique de la loi. D’après M. Floran Vadillo (1), la
loi du 24 juillet 2015 est préservée de tout risque d’obsolescence programmée car
dans ce texte, « la modalité technique importe moins que la nature de l’ingérence
(violation du secret des correspondances, violation du domicile, etc.), ou du
renseignement recueilli (données, paroles, images, position géographique). Et
lorsqu’un dispositif technique est évoqué, la loi veille à ne rien figer grâce à
l’emploi de termes génériques et au renvoi à des actes réglementaires. En
substance, la loi de 2015 a été rédigée pour ne pas vieillir, à l’instar de celle de
1991 qui, votée avant internet et le téléphone mobile, n’a pas nécessité de
modifications pour prendre en charge les avancées technologiques. Par
conséquent, les évolutions technologiques ne peuvent avoir d’incidence sur la
rédaction lorsque leur principe figure dans la loi. (…) Si les services de
renseignement devaient utiliser des drones, (…) il leur suffirait, selon le
chercheur, d’énumérer les capacités du drone : collecte de données techniques
(L. 851-6), interceptions (L. 852-1 II), captation de données informatiques
(L. 853-2), captation d’images ou de son (L. 853-1), pénétration domiciliaire
(L. 853-3). »
De fait, on l’a vu en première partie de ce rapport, les articles 5 et 6 de la
loi de 2015, qui sont codifiés au titre V du livre VIII du code de la sécurité
intérieure, et qui ont trait aux techniques de recueil de renseignement, ne visent
pas explicitement de technologies mais les « accès administratifs aux données de
connexion », les « interceptions de sécurité », la « sonorisation de certains lieux et
véhicules », la « captation d’images et de données informatiques », « les mesures
de surveillance des communications électroniques internationales » et « les
mesures de surveillance de certaines communications hertziennes ».
Les membres de la mission d’information souscrivent entièrement à l’idée
qu’il importe d’assurer la stabilité du cadre juridique instauré par la loi
du 24 juillet 2015 – un texte dont ils ont voulu montrer en première partie de ce
rapport qu’il était équilibré et qu’il avait fait l’objet d’un important travail
d’appropriation par les services de renseignement. Ils se félicitent également de
cette plasticité du texte et donc de la clairvoyance du législateur de 2015. Par
conséquent, la mission d’information ne peut que plaider contre des modifications
par trop fréquentes de la loi.
Néanmoins, la question technologique a été soulevée lors de nombreuses
auditions de la mission d’information, c’est pourquoi il importe à ses membres
d’aborder cet enjeu.

(1) In L’Hétairie, Une seconde loi renseignement ? Pour une main tremblante mais des idées claires, note du
9 mars 2020, pp. 8 et sq

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