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Si les parlementaires se rallièrent aux souhaits de Nicolas Sarkozy, ils
avaient déjà entamé un travail de réflexion préalable matérialisé par le dépôt de
trois amendements.
L’amendement n° 82 avait été déposé par Jacques Floch et Julien Dray
(groupe socialiste) dans le but de créer une délégation parlementaire d’information
et d’évaluation des actions conduites par les services de renseignements dépendant
des ministères de l’Intérieur, de la Défense et des Finances. Composée de sept
sénateurs et d’autant de députés de manière à assurer une représentation
proportionnelle des groupes politiques, elle semblait destinée à ne disposer que
d’un pouvoir d’audition, au demeurant très large.
L’amendement n° 134 avait été déposé par Pierre Lellouche (groupe
UMP) en vue d’instituer une commission de contrôle des services de
renseignement, composée de trois députés, trois sénateurs, un membre du Conseil
d’État, un membre de la Cour de cassation et un membre de la Cour des comptes.
Le texte prévoyait que « la commission [prît] connaissance de tous les documents,
pièces et rapports susceptibles de l’éclairer dans ses travaux, à l’exception de
ceux relatifs à des opérations en cours et sous réserve des nécessités de la
protection des personnes ».
Au cours de sa réunion du 23 novembre 2005, la commission des Lois
repoussa l’amendement de Jacques Floch, tandis que celui de Pierre Lellouche ne
put être examiné en raison de son absence. En revanche, elle adopta un
amendement du rapporteur visant à instituer une commission nationale de contrôle
des services de renseignement, modifié sur la suggestion de Jacques Floch afin de
porter de six à dix le nombre de parlementaires composant l’instance
(amendement n° 124 rect.). À l’exclusion des opérations en cours, cette
commission pouvait procéder au contrôle de l’activité générale des services. À
cette fin, elle jouissait d’un pouvoir d’audition et de communication de toute pièce
nécessaire à son action.
Lors du vote public, le 24 novembre 2005, les amendements n° 124 rect. et
n° 82 furent retirés, conformément au souhait du ministre de l’Intérieur. Le groupe
écologiste repris néanmoins à son compte le second, qui fut repoussé, à l’instar de
celui de Pierre Lellouche. Mais, comme le fit remarquer non sans gravité Julien
Dray, c’était sans doute la première fois qu’une telle discussion se tenait dans
l��hémicycle (1).
Le groupe de travail promis par Nicolas Sarkozy ne vit pas le jour dans la
mesure où le Gouvernement Villepin s’empara du sujet et, par l’entremise d’Henri
Cuq, ministre chargé des relations avec le Parlement, déposa un projet de loi
portant création d’une délégation parlementaire pour le renseignement (DPR) dès
le mois de mars 2006 (projet issu du travail du SGDN). Très investi sur la
question, Alain Marsaud fut naturellement désigné rapporteur de ce texte pour la
(1) Compte rendu des débats, séance publique du 24 novembre 2005, JORF, p. 7489.