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extensives d’une partie de la doctrine qui considère que le député reste dans le
domaine de son mandat législatif quelle que soit l’enceinte dans laquelle il
s’exprime (par oral ou par écrit). Par sa décision du 7 novembre 1989 (n° 89-262
DC), le Conseil constitutionnel a censuré une disposition prévoyant que ne
donnerait lieu à aucune action le rapport d’un parlementaire établi pour rendre
compte d’une mission confiée par le gouvernement en application de l’article
L.O. 144 du code électoral. Il a considéré qu’« en exonérant de façon absolue de
toute responsabilité pénale et civile un parlementaire pour des actes distincts de
ceux accomplis par lui dans l’exercice de ses fonctions », le texte méconnaissait
« le principe constitutionnel d’égalité devant la loi ». En outre, la jurisprudence a
exclu les propos d’un parlementaire tenus au cours d’un entretien radiodiffusé (1).
Mais ces restrictions ne règlent pas les problèmes posés par la
connaissance d’éléments classifiés, et les diverses dispositions législatives
concernant des activités touchées par cette question n’ont pas su adapter au statut
des parlementaires les règles applicables au secret de la défense nationale. Elles
ont maintenu un statu quo flou qui perdure faute de crise.
La difficulté concerne ainsi les parlementaires membres de la Commission
consultative du secret de la défense nationale. En effet, l’article 5 de la loi
n° 98-567 du 8 juillet 1998, codifié à l’article L. 2312-5 du code de la défense,
prévoit simplement que les membres de la commission – dont les parlementaires –
« sont autorisés à connaître de toute information classifiée dans le cadre de leur
mission » et qu’ils sont « astreints au respect du secret de la défense nationale
protégé en application des articles 413-9 et suivants du code pénal pour les faits,
actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance à raison de leurs
fonctions ».
De même, les membres de la CNCIS – dont deux parlementaires, désignés
en tant que tels – sont astreints « au respect des secrets protégés par les
articles 413-10, 226-13 et 226-14 du code pénal pour les faits, actes ou
renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions »,
en application de l’article 13 de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au
secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques,
codifié à l’article L. 243-4 du code de la sécurité intérieure.
Toutefois, ces parlementaires étant nommés en tant que tels par les
présidents des deux assemblées, ils bénéficient de la protection offerte par
l’article 26 de la Constitution. Toute compromission du secret de la défense
nationale qui prendrait la forme de travaux parlementaires (discours à la tribune,
rapport d’information, etc.) ne pourrait vraisemblablement pas être sanctionnée.
La Délégation parlementaire au renseignement n’innove pas sur ce
point. Ses membres sont autorisés ès qualités à connaître des informations ou des
(1) La Cour de cassation a, par exemple, estimé que ne peut bénéficier d’une immunité le rapporteur d’une
commission d’enquête pour des propos tenus au journal télévisé portant sur le contenu du rapport
(Cass, crim, 30 septembre 2003).