Contribution de Jean-Jacques URVOAS
Dieudonné Mandelkern qui estimait nécessaire en 2001 d’élever à cinq le
nombre de membres, au prétexte que, trop restreint, celui-ci nuisait au
fonctionnement de la CNCIS 1, mais cette réserve ne le conduisit pas pour
autant à remettre en cause la présence de parlementaires. Ses prédécesseurs et successeurs, eux, ne formulèrent jamais la moindre critique
quant aux modalités du mécanisme en vigueur. À titre d’illustration, il
suffit de citer le propos tenu par Jean-Louis Dewost, président de l’instance de 2003 à 2009 et qui, à l’occasion des vingt ans de la loi de 1991,
évoque dans le rapport annuel de la CNCIS « la sagesse du législateur
[qui] a prévu que le président soit assisté de deux parlementaires », dont
l’expérience politique vient « conforter la vision plus juridique du président » 2. Ou encore celui d’Hervé Pelletier qui soulignait dans le 21e rapport la garantie qu’apportait la présence des représentants de la Nation 3.
Et pourtant des questions se posent
Ce n’est que récemment que des interrogations se firent jour. Ainsi
en 2010, René Dosière (PS) et Christian Vanneste (UMP) ont estimé dans
leur rapport destiné au Comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée que « la présence de parlementaires dans les collèges, en particulier
pour les AAI traitant des libertés publiques, [fait] débat » 4.
Après comparaison des avantages – indépendance, légitimité… –
et des inconvénients – séparation des pouvoirs, impartialité, voire assiduité insuffisante compte tenu d’un agenda parlementaire toujours
plus chargé – leur conclusion se révèle sans appel. Ils considèrent que
la présence de parlementaires dans les collèges comporte un « risque
de confusion des pouvoirs et pourrait servir d’alibi cachant l’absence de
contrôle ». Et comme ils reconnaissent qu’il serait improductif de la proscrire de façon générale et absolue, notamment pour les AAI intervenant
dans le domaine des libertés publiques, ils préconisent que les élus qui
accepteraient d’y siéger démissionnent de leur mandat parlementaire
pendant la durée de leurs fonctions au sein du collège.
Puis en 2013, dans un rapport consacré au « cadre juridique des
services de renseignement » rédigé en collaboration avec le député UMP
du Rhône Patrice Verchère, j’eus l’occasion d’approfondir cette analyse
1) CNCIS, 9e rapport d’activité, année 2000, Paris, La Documentation française, 2001, p. 11.
2) Jean-Louis Dewost, « Le 20e anniversaire de la Commission nationale de contrôle des
interceptions de sécurité » 20e rapport d’activité 2011-2012, Paris, La Documentation française, 2012, p. 11.
3) CNCIS, 21e rapport d’activité, années 2012-2013, Paris, La Documentation française,
2013, p. 6.
4) René Dosière, Christian Vanneste, Les autorités administratives indépendantes, rapport d’information, Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, n° 2925,
Assemblée nationale, 28 octobre 2010.
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