CNCIS – 23e rapport d’activité 2014-2015
administrative, en dépit des intentions que certains journalistes hostiles au projet de loi n’ont pas manqué de me prêter avec beaucoup
d’insistance 1.
Dans cette optique, la présente contribution ambitionne d’être à
la fois un témoignage – que j’espère utile – sur mon mandat triennal au
sein de la CNCIS, et une réflexion sur les raisons qui m’ont conduit à
défendre l’idée d’une commission dont les élus seraient écartés.
Dès l’origine, un choix consensuel
La création d’une instance de contrôle indépendante constituait
l’une des dispositions essentielles du rapport sur « les écoutes téléphoniques » commandé par le Premier ministre Pierre Mauroy au Premier
président de la Cour de cassation, Robert Schmelck 2. Mais dix ans s’écoulèrent avant qu’elle ne soit reprise dans le projet de loi déposé le 29 mai
1991 par le Gouvernement d’Édith Cresson.
Ainsi, après la création en 1967 de la Commission des opérations
de bourse (COB) et surtout en 1978 de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), naissait une nouvelle instance collégiale
de contrôle. Après de multiples hésitations sur le statut qu’il convenait
de donner à celle-ci, le Parlement, à la suite d’un amendement déposé
au Sénat, écartant tout à la fois l’instauration d’un établissement public à
la tutelle allégée et un rattachement pur et simple aux services du ministère de la Justice, a finalement opté pour l’option la plus radicalement
audacieuse.
Le statut de l’autorité ainsi instituée était en effet « l’expression
d’un oxymore » 3 : être à la fois une autorité administrative, c’est-à-dire
relevant du pouvoir exécutif, mais dans le même temps une autorité
indépendante, et donc soustraite au principe rappelé par l’article 20 de
la Constitution selon lequel le Gouvernement, responsable devant le
Parlement, détermine et conduit la politique de la Nation et dispose à
cette fin de l’administration.
Cette initiative fut la première d’une longue série qui aboutit par
la suite à la création de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) (loi du 17 juillet 1978), de la Haute Autorité de l’audiovisuel (loi du 29 juillet 1982) puis de la Commission nationale de la
communication et des libertés (loi 30 septembre 1986), du Médiateur de
1) Voir par exemple « Loi renseignement : conflit d’intérêts de Jean-Jacques Urvoas »,
http://www.numerama.com/magazine/32641-loi-renseignement-conflit-d-interets-dejean-jacques-urvoas.html
2) Il lui fut remis le 25 juin 1982.
3) Jean-Marc Sauvé, audition à l’Assemblée nationale, 11 février 2010.
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