CNCIS – 23e rapport d’activité 2014-2015

aspect international est développé. Il en va de même du terrorisme :
quelques-unes de ses racines sont hexagonales ; mais la part essentielle
de la menace a des causes externes. La plupart des affaires de « sécurité
nationale » ont également une origine étrangère. C’est pourquoi la distinction qui prévalait autrefois et séparait les services selon leur champ
d’intervention s’efface dans la pratique. Identifier un trafiquant introduisant des stupéfiants sur le territoire national implique des moyens de
surveillance déployés en France comme à l’étranger. La loi de 2015 en
a tiré les conséquences, en envisageant expressément le cas d’utilisateurs de téléphones français ou soumis à des interceptions de sécurité
en France qui se trouveraient à l’étranger. Mais cette disposition est loin
de couvrir le champ de la réalité.
– La seconde, très délicate, est de droit. Si les données numériques
font, comme on l’a indiqué, le tour du monde, quel est donc le régime
juridique qui s’y attache ? Faut-il continuer d’espérer leur appliquer une
loi nationale mais, dans l’affirmative, sous quelle forme ? Si aucune loi
ne prévaut mais seulement les aspects contractuels d’un rapprochement
conclu sur un simple « clic », comme on dit, entre un utilisateur et un
fournisseur multinational, comment y rentrent des activités régaliennes
comme celles du renseignement ?
La loi de 2015 ne s’est pas hasardée sur ce terrain, qui doit être pourtant clarifié. La CNCIS, soucieuse d’avancer en la matière, a demandé à
un juriste éminent de tenter une première approche de la question, qu’on
n’explorera donc pas davantage ici. On trouvera ci-après la contribution
éclairante de Mme le professeur FAUVARQUE-COSSON.
Demain, il faudra bien que le contrôle trouve des éléments de
réponse à cette interpénétration, dans le champ de la sécurité, des éléments nationaux et internationaux, si l’on ne veut pas, une fois encore,
risquer de laisser des pans importants de l’activité des services hors de
vue.
La dernière question, beaucoup plus traditionnelle, est de savoir
quelles conséquences doivent être tirées de constats négatifs opérés par
le contrôle, singulièrement sous la forme de sanctions éventuelles.
Depuis 1991, la CNCIS est un organisme consultatif. Elle donne un
avis au Premier ministre, qui a la liberté de le suivre ou de s’en affranchir.
Cette solution est heureuse. Les autorités administratives indépendantes ne sauraient se substituer à l’exécutif. Leur objet est de faire
œuvre d’arbitrage ou de régulation, lorsqu’autrement l’État risquerait
d’être juge et partie (ainsi dans le domaine de l’énergie, des banques,
des télécommunications ou de l’audiovisuel) ; ou bien de l’éclairer quand
une opinion déliée de tout intérêt peut aider l’autorité publique à arbitrer entre deux intérêts majeurs. Telle est cette dernière situation qui se
présente quand il faut choisir entre un droit attaché aux personnes et l’atteinte à l’ordre public. Le Gouvernement est responsable de ce dernier.

28

CNCIS 2015 IV.indd 28

26/06/2015 11:17:36

Select target paragraph3