Le contrôle des techniques de renseignement
non seulement selon les finalités définies mais aussi aux personnes auxquelles elles sont destinées. Cette utilisation « étroite » a des contraintes
techniques.
Le second inconvénient provient de la vulnérabilité de la donnée.
Elle peut disparaître aisément, ou se dissimuler, ou encore être différée. La difficulté du contrôle s’en trouve sensiblement accrue. Comment
acquérir la certitude que ce qui lui est présenté correspond trait pour
trait à ce qui a été effectivement recueilli. C’est pourquoi des dispositions doivent être prises pour que la véracité des données présentées
soit établie ; sans quoi tous les détournements seraient possibles. Elles
prennent la forme de diverses solutions techniques : la traçabilité des
manipulations apportées aux dispositifs de recueil, la transmission en
temps réel des données au contrôle, la duplication pure et simple de
certaines d’entre elles si la transmission n’est pas immédiatement envisageable. Ici est en jeu l’exhaustivité du contrôle qui est l’un des aspects
de l’effectivité évoquée précédemment.
L’avant-dernière question a trait au contrôle qui peut être fait des
activités internationales de renseignement ou de police.
Cette question ne devrait pas se poser dans un contexte classique.
Pour un motif très simple. La loi française qui organise un contrôle – celle
de 1991 par exemple – ne saurait s’appliquer dans un territoire étranger.
Il n’en va autrement que dans des hypothèses particulières, soigneusement délimitées par la règle nationale ou internationale ou bien la jurisprudence ; ainsi pour la loi pénale : le juge français est compétent dans
le cas de crimes commis sur ou par des Français à l’étranger. Mais une
loi régissant le contrôle d’une administration française n’a d’application
que sur le territoire.
Certes, la CNCIS a pu, à l’initiative de ses présidents, et avec l’accord des Premiers ministres du moment, développer non pas un contrôle
actif sur les activités à l’étranger, mais un contrôle « passif », en s’assurant que les activités des services à l’étranger ne comportaient aucune
trace de téléphones français ni de recueil d’enregistrements en France.
Toutefois, il est resté sans lendemain.
La loi de 2015 sur le renseignement aborde heureusement la question (article L. 854-1 du Code de la sécurité intérieure). Elle mérite en effet
évolution pour deux raisons :
– La première est de fait. Comme on le sait depuis longtemps 1,
la délinquance n’est pas désormais arrêtée par les frontières. C’est le
contraire ; elle en joue. Il n’est pas exagéré d’affirmer que plus la délinquance ou le crime sont « organisés » au sens de la loi pénale, plus leur
1) Voir par exemple le fameux « Appel de Genève » de sept magistrats européens spécialisés dans les affaires financières et de corruption, le 1er octobre 1996.
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