Le contrôle des techniques de renseignement

Cette manière de faire est vraisemblablement incompatible avec
les effectifs d’une commission pléthorique. La CNCIS a pu valablement fonctionner à trois membres, comme son équivalent néerlandais
ou presque comme son homologue allemand (quatre personnes). Ce
nombre peu élevé est le corollaire obligé d’une décision rapide ; sans
compter qu’il accroît les chances de la préservation du secret.
La sixième condition est de nature proprement politique et technique à la fois. Elle réside dans la confiance qui doit s’instaurer entre les
pouvoirs publics, en l’espèce le Premier ministre ou son directeur de cabinet, le maître d’œuvre technique, c’est-à-dire le directeur du Groupement
interministériel de contrôle (GIC), et la Commission, singulièrement son
président 1. Confiance d’abord entre les membres de la Commission dans
les décisions prises et l’application qui en est faite. Confiance du Premier
ministre dans la Commission, pour lui donner des avis rigoureux, assis
sur les réalités et dont le secret est soigneusement préservé. Confiance
du Premier ministre et du président de la Commission dans l’exécution stricte des décisions prises par le GIC. Confiance de la Commission
dans l’étendue des premiers contrôles opérés par le Groupement sur la
réalisation des interceptions. Cette confiance, qui implique une grande
compréhension du rôle de chacun et la prise de conscience de l’interdépendance des trois, permet de donner aux procédures leur rigueur, à
la prise de décision son rythme et de concentrer l’attention sur les dossiers les plus délicats. Elle suppose des contacts aisés aussi souvent que
nécessaire.
La qualité des interceptions de sécurité, c’est-à-dire leur conformité
aux libertés établies et l’efficacité qu’en attendent les services, peut être
fortement compromise dès lors que l’un de ces liens essentiels disparaît.
La dernière condition qui s’attache au contrôleur tient à ses obligations vis-à-vis des citoyens, pour les libertés desquels il est une garantie
voulue par le législateur.
Il en a au moins deux.
La première est de se prononcer, comme on le dit dans les juridictions en matière d’indemnisation, « tous intérêts compris », en prenant donc en considération les préoccupations tenant non seulement à
la sécurité et aux besoins des services, mais aussi celles qui s’attachent
à la préservation des droits et libertés individuels. Sans quoi, naturellement, le contrôle serait sans portée. Cette évidence dissimule cependant
l’étroitesse du chemin qui doit être suivi et l’instabilité du bon équilibre
à faire respecter. D’autant que, par expérience, on sait assez vite que la

1) Sur cette condition, voir les considérations de Jean-Louis Dewost dans le chapitre consacré au vingtième anniversaire de la Commission nationale de contrôle dans le 20e rapport
d’activité (années 2011-2012) de la CNCIS, Paris, La Documentation française, décembre
2012, spéc. p. 10 sq.

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