CNCIS – 23e rapport d’activité 2014-2015

Le contrôleur doit impérativement comprendre la nature des missions de ceux qu’il contrôle. Il n’a pas à s’interroger sur le bien-fondé
de celles-ci, pour autant qu’elles rentrent dans le cadre de la loi. Mais
il doit avoir pleinement conscience de leurs enjeux géopolitiques et de
sécurité. Il doit mesurer toutes les servitudes qui s’y attachent, en comprendre les exigences, en assimiler les priorités. Le temps des services
de police et de renseignement allie la collecte patiente et multiforme
de données et l’analyse de celles-ci le plus souvent dans l’urgence. Ces
contraintes, qui nécessitent en particulier des temps de réaction rapides
et permanents, doivent être connues du contrôleur, qui doit en assurer le respect dans l’exercice de sa mission. À cette fin, il lui appartient
de maintenir, avec tous les professionnels concernés, un dialogue aussi
régulier que possible.
Mais, simultanément, sa mission est d’une nature radicalement
différente. Le monde du renseignement a ses caractères et ses accommodements qu’il convient d’ignorer. Ce qu’on appellera « l’enjolivement » fait partie du jeu. La connaissance que les services ont la charge
de recueillir constitue évidemment un pouvoir qui s’exerce dans l’art de
la communiquer. Les demandes que connaît le contrôleur sont remarquables par ce qu’elles disent mais aussi par ce qu’elles peuvent ne pas
indiquer. La facilité avec laquelle certaines peuvent passer d’une finalité à l’autre (par exemple de la sauvegarde des intérêts économiques
essentiels à la sécurité nationale) est une illustration du caractère parfois
imprécis de la réalité présentée.
Le contrôleur n’a pas à épouser cette manière de faire. Il doit être
au clair sur les principes qui sont les siens et dégager les lignes d’un
contrôle lisible et constant. Dans ces principes, il ne peut y avoir qu’intransigeance, dès lors qu’ils constituent l’armature d’un bon équilibre
entre la sécurité et les droits du citoyen. Ceux-ci ne peuvent osciller au
gré des nécessités quotidiennes de l’action policière. C’est à celle-ci, au
contraire, de s’y faire.
Il s’en déduit, quant à la méthode – c’est là la troisième condition
à remplir – que le contrôle ne peut donc reposer sur la seule déclaration des services contrôlés. Chacun peut pressentir qu’un régime entièrement déclaratif est une procédure qui n’a pas sa place en matière de
police et de renseignement. C’est une des clés de l’effectivité évoquée
d’aller au-delà du déclaratif pour accéder à la réalité du travail effectué.
Ceux qui ont institué et mis en œuvre, à compter de 1991, la CNCIS l’ont
parfaitement compris, qui ont décidé de mettre à sa disposition, non
seulement les motivations des services justifiant les interceptions, mais
aussi les enregistrements réalisés et les transcriptions qui en sont faites.
Cette mise à disposition n’est pas différée, elle se fait « en temps réel ».

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