CNCIS – 23e rapport d’activité 2014-2015

Une motivation pertinente
L’examen de cette pertinence porte sur trois points :
– la motivation doit être exclusivement tournée vers la vocation préventive voulue par le législateur de 1991 pour les interceptions de sécurité.
Outil de renseignement, ces mêmes interceptions ne peuvent être utilisées pour l’élucidation de faits passés relevant de l’autorité judiciaire ;
– corrélativement, la motivation doit exclusivement se référer à des
investigations participant de l’activité de renseignement et en aucun cas
pouvoir générer un « risque d’interférence » avec une action judiciaire
déjà déclenchée ;
– enfin, les soupçons qui pèsent sur la cible doivent nécessairement être
en relation directe avec le motif. Ainsi un comportement dont la description reste floue, vague, imprécise et non « rattachable » au travail d’articulation juridique déjà décrit prive la demande de toute pertinence.
La Commission a poursuivi son inscription dans une volonté de
dialogue avec les services demandeurs. Cette démarche s’est traduite
par une nette augmentation des réunions bilatérales au plus haut niveau
avec chacun des services. Elle s’est également matérialisée, au stade de
l’examen de leurs demandes, par une logique d’avis moins binaire (avis
favorable/défavorable). De fait, le nombre d’observations a encore crû
en 2014.
Les avis défavorables sont relativement stables (légère diminution
en 2014, légère augmentation sur le premier quadrimestre de 2015), et
restent très peu nombreux au regard de l’augmentation du volume global des mesures sollicitées. La CNCIS déplore toutefois que le Premier
ministre décide de passer outre son avis défavorable de manière de plus
en plus fréquente depuis 2014.
À ce chiffre des avis négatifs « bruts », il convient d’ajouter deux
techniques d’observation déjà répertoriées dans le rapport d’activité 2008
qui peuvent s’apparenter à « l’avis défavorable » :
• La recommandation adressée au Premier ministre visant à l’interruption de l’interception en cours d’exploitation qui résulte de l’examen
exhaustif des « productions » (transcriptions) opérées à partir d’une interception. En moyenne, depuis 1991, il y est fait recours dix à quinze fois par
an. Elles étaient toujours suivies par le Premier ministre jusqu’en 2013.
Depuis 2014, le Premier ministre marque une propension à y donner
suite au terme d’un délai prolongé, en contradiction avec les termes de la
loi, voire à refuser de suivre les recommandations de la Commission, au
risque de maintenir une interruption illégale. Il s’agit d’un motif d’inquiétude pour les membres de la CNCIS qui ont tenu à le mentionner dans le
rapport public.
• La « préconisation d’interruption » adressée par la Commission au service utilisateur en cours d’exploitation. Elle résulte du même examen
des productions et procède d’un dialogue constructif mené directement
avec les services utilisateurs pour un réexamen de l’interception et de

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