CNCIS – 23e rapport d’activité 2014-2015
En France, cette voie a été particulièrement développée, en raison
de la place qu’ont prises dans la vie publique, depuis quarante ans, les
autorités administratives indépendantes. Trois d’entre elles sont associées de près ou de loin au contrôle des activités de renseignement :
la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), pour
les bases de données de sécurité qu’elles génèrent, la CNCIS, pour les
trois techniques communément employées, et, plus indirectement, la
Commission nationale consultative du secret de la défense nationale
(CNCSDN), en ce qu’elle autorise ou non la « déclassification » de dossiers protégés par le secret. A titre nettement plus subsidiaire, l’Autorité
de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP),
qui a notamment pour fonction de réguler le marché des opérateurs téléphoniques, est susceptible de porter un intérêt à la manière dont ces derniers s’acquittent de leurs obligations au titre de l’emploi de techniques
de surveillance dans le secteur des communications électroniques. Mais,
en réalité, seule la CNCIS intervient en temps utile (c’est-à-dire dans le
temps de l’action) dans l’activité des services.
Ces indications générales sur les différentes modalités du contrôle
étant rappelées, c’est sur ce contrôle administratif qu’il convient à présent de se concentrer, pour en définir les principales exigences.
À quels caractères doit répondre
le contrôleur ?
Il en va du contrôle comme de la norme juridique telle que l’analyse notamment la Cour européenne des droits de l’homme. La perfection abstraite de la loi n’est nullement décisive dans la préservation des
droits ; c’est son application aux situations concrètes qui en marque
la portée véritable. « Beaucoup de lois, relève par exemple la Cour, se
servent-elles, par la force des choses, de formules plus ou moins vagues
dont l’interprétation et l’application dépendent de la pratique » 1. Ou
encore : « Afin de préserver la privation de liberté de tout arbitraire, il
n’est pas suffisant que cette mesure soit exécutée conformément à la loi ;
elle doit être rendue nécessaire par les circonstances » (CEDH, 5e section,
5 mars 2015, Kotiy c/ Ukraine, n° 28718/09, § 42) ; dans le même sens :
CEDH, 27 février 2007, Nešťák c/ Slovaquie, n° 65559/01, § 74 ou CEDH,
14 octobre 2010, Khayderinov c/ Ukraine, n° 38717/04, § 27. En définitive,
selon une formule bien connue, « la Convention 2 a pour but de protéger
des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs »
1) CEDH, 22 octobre 2007, Gde Chambre, Lindon, Otchakovsky-Laurens et July c. / France,
n° 21279/02 et 36448/02, § 41.
2) C’est-à-dire la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des
libertés fondamentales.
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