Le contrôle des techniques de renseignement

américain s’était doté d’un tel instrument à la fin des années 1970, le
Bundestag allemand en 1979 et les Communes en 1994. Les prérogatives
de la délégation ont été renforcées par les dispositions relatives au renseignement de la loi n° 2013-1168 de programmation militaire (2014-2019)
du 18 décembre 2013 et son rapport pour 2014, nettement plus dense et
incisif, s’en est ressenti.
• Un contrôle de nature judiciaire. Il ne fait aucun doute lorsque
la police agit dans le cadre d’une enquête ou d’une information judiciaire, dès lors que les techniques de surveillance utilisées par les services, autorisées par le Code de procédure pénale (en particulier par les
articles 100 et suivants), le sont sur demande d’un magistrat 1. Mais, dans
certains pays, les moyens de surveillance employés dans le cadre de la
police administrative peuvent également être l’objet d’un contrôle par
un juge. Il s’agit alors, le plus souvent, notamment dans le monde anglosaxon, d’une juridiction spécialisée. Au Royaume-Uni, l’Investigatory
Powers Tribunal connaît des recours individuels dirigés contre l’emploi
de moyens de surveillance par les services de renseignement.
En France, les opérations de police administrative, celles qui
tendent à la préservation de l’ordre public, relèvent de la compétence du
juge administratif qui en contrôle à la fois la légalité externe et la légalité
interne, notamment la proportionnalité entre la mesure employée et le
risque d’atteinte à l’ordre public. Mais la singularité des techniques de
surveillance rend le recours devant le juge sur leur emploi très hypothétique : en effet, elles sont prises, par construction, à l’insu des personnes
surveillées. Il est certes possible au justiciable de contester une décision
qu’il ne connaît pas directement mais dont il subit les effets ; toutefois
cette voie n’est guère plus fructueuse, pour des motifs identiques. Par
conséquent, le contrôle juridictionnel des services de police et de renseignement reste parfaitement théorique, jusqu’à l’intervention de la loi sur
le renseignement.
• Un contrôle, enfin, de nature indépendante, effectué par une
autorité de composition variable, mais toujours distincte du pouvoir exécutif 2 : ce procédé est particulièrement développé dans les pays dans
lesquels l’accent n’a pas été mis sur le contrôle juridictionnel (quelle
que soit son efficacité) : ainsi, pour le domaine du renseignement, la
Commission dite G-10 en Allemagne fédérale, la Commission de surveillance néerlandaise ou, dans une matière un peu distincte, le Garant de la
protection des données italien.

1) Dans la pratique toutefois, compte tenu de leurs charges et des relations qu’ils se
doivent d’avoir avec les services enquêteurs, le contrôle des techniques peut être d’effectivité inégale.
2) En cela, de manière décisive, ce contrôle se distingue du contrôle proprement hiérarchique qui peut être le fait d’inspections générales rattachées au ministre compétent. Ces
inspections (complétées en France, depuis peu, par l’inspection – interministérielle – du
renseignement) ont surtout pour fonction d’intervenir en cas de difficultés survenues.

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