Actualité parlementaire
Interpol
20270.— 13 novembre 1989. —M. François Asensi attire l'attention de
M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur de récentes arrestations de
militants politiques effectuées grâce à l'organisation internationale de police
criminelle (O.I.P.C. — Interpol) et qui ne manque pas de le préoccuper. En
effet, la commission interne de contrôle des fichiers d'Interpol dont on nous a
dit qu'elle préviendrait ce type d'abus n'a en rien pu empêcher ces
détournements de finalité d'Interpol par des polices totalitaires qui ont à peine
pris la précaution de camoufler sous des dehors de droit commun les raisons
politiques de leurs demandes. C'est le cas de la fiche d'Interpol sur le
syndicaliste chilien Sergio Bushmann, réfugié politique en Suède, arrêté en
Australie avant d'être rapidement relâché sous la pression de parlementaires,
puis arrêté encore aux Etats-Unis tandis que son avion y faisait escale et libéré
sur intervention de l'ambassade suédoise. Plusieurs Turcs, en France, ont
également fait l'objet de mesures similaires. Chaque fois, ces abus ont résulté
d'une intervention d'Interpol contraire à l'article 3 de ses statuts, prohibant toute
intervention ayant un caractère politique, racial, religieux ou militaire. C'est
pourquoi il lui demande si l'immunité de juridiction dont bénéficie Interpol,
prévue par les accords de siège signé en 1982, couvre également l'O.I.P.C.
dans le cas où cette dernière serait intervenue en violant ses règles statuaires,
et, dans l'affirmative, de quels recours dispose l'éventuelle victime pour obtenir
réparation. — Question transmise à M. le ministre d'Etat, ministre des
affaires étrangères.
Réponse. — L'Organisation internationale de police criminelle (O.I.P.C.
— Interpol) jouit de l'immunité de juridiction pénale, civile et administrative sur
le territoire de la République française, sauf dans les cas limitativement prévus
dans l'article 5 de l'accord de siège entre le Gouvernement de la République
française et cette organisation, signé à Paris, le 3 novembre 1982, qui dispose
que : “ 1° L'organisation jouit de l'immunité de juridiction sauf dans les cas : a)
d'une action civile fondée sur une obligation de l'organisation résultant d'un
contrat; b) d'une action civile intentée par un tiers au titre d'un dommage
résultant d'un accident causé par un véhicule à moteur appartenant à
l'organisation ou utilisé pour son compte, ou d'une infraction à la
réglementation de la circulation des véhicules automoteurs mettant en cause un
tel véhicule; c) d'une action reconventionnelle. ” Les situations exposées dans la
question écrite ne constituent donc pas l'une des exceptions au principe de
l'immunité de juridiction dont jouit Interpol. En conséquence, les victimes de tels
agissements fautifs éventuels de l'organisation ne disposent pas de recours
judiciaire contre Interpol, mais elles peuvent saisir la commission de contrôle
des fichiers de cette organisation puisque celle-ci a pour triple mission, non
seulement de s'assurer en premier lieu que les informations nominatives
contenues dans les fichiers d'Interpol sont exactes, enregistrées pour des
finalités déterminées et obtenues et traités conformément au statut d'Interpol,
mais aussi de tenir à la disposition de tout ressortissant ou résident d'un Etat
membre de l'organisation la liste des fichiers et effectuer à leur demande et
pour leur compte les vérifications nécessaires, et enfin de faire modifier, le cas
échéant, par Interpol les informations que cette organisation détient.
Assemblée nationale, 12 février 1990, p. 642
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