Conseil d'État, Assemblée, 21/04/2021, 393099, P...

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du délai de six mois laissé au Gouvernement pour compléter les dispositions litigieuses, se soustraire à cette obligation et aux
sanctions dont sa méconnaissance est assortie au motif que la durée de l'injonction qui leur est faite n'a pas été limitée dans le
temps par le pouvoir réglementaire.
54-06-07-005 Les articles L. 851-1, L. 851-2, L. 851-4 et le IV de l'article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure (CSI) relatifs
aux modalités d'accès des services de renseignement aux données de connexion méconnaissent le droit de l'Union européenne,
faute pour la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) de disposer d'un pouvoir d'avis
conforme.,,,1) L'annulation des décrets attaqués en tant qu'ils permettent l'application de ces dispositions sans contrôle préalable
par une autorité administrative indépendante dotée d'un pouvoir d'avis conforme ou une juridiction, en dehors des cas d'urgence
dûment justifiée, ne saurait toutefois avoir pour conséquence d'entacher d'illégalité, pour le passé, l'usage par les services de
renseignement des techniques prévues par ces articles que dans les hypothèses où le Premier ministre les aurait mises en
oeuvre, en dehors des cas d'urgence dûment justifiée, malgré un avis défavorable de la commission.,,,Or, il ressort des rapports
publics de la commission que l'avis rendu par celle-ci préalablement à la mise en oeuvre de ces techniques de renseignement,
bien qu'étant dépourvu d'effet contraignant, a été, dans les faits, systématiquement suivi par le Premier ministre.... ,,Il suit de là
que l'annulation rétroactive des décrets attaqués, qui n'impliquerait par elle-même la suppression d'aucune donnée recueillie par
les services de renseignement sur leur fondement, n'emporterait pas de conséquences manifestement excessives.,,,2) Par
ailleurs, l'annulation des décrets attaqués, compte tenu de sa portée, implique seulement, dans l'attente de l'intervention des
textes nécessaires à la mise en conformité du droit national avec le droit de l'Union européenne, qu'en cas d'avis défavorable de
la CNCTR, le Premier ministre ne pourra légalement autoriser la mise en oeuvre des techniques de renseignement mentionnées
aux articles L. 851-1, L. 851-2, L. 851-4 et au IV de l'article L. 851-3 du CSI avant l'intervention de la décision du Conseil d'Etat,
qu'il appartiendra alors à la commission de saisir en application de l'article L. 833-8 du même code.... ,,3) Dans ces conditions, il
n'y a pas lieu de différer dans le temps les effets de l'annulation ainsi prononcée.
54-06-07-005 Par son arrêt du 6 octobre 2020 La Quadrature du Net et autres (C-511/18, C-512/18, C-520/18), la Cour de justice
de l'Union européenne (CJUE) a dit pour droit que la directive 2002/58/CE du 12 juillet 2002 ne s'opposait pas à ce que des
mesures législatives permettent, aux fins de sauvegarde de la sécurité nationale, d'imposer aux opérateurs la conservation
généralisée et indifférenciée des données de trafic et des données de localisation, sous réserve qu'une décision soumise à un
contrôle effectif constate l'existence d'une menace grave pour la sécurité nationale qui s'avère réelle et actuelle ou prévisible,
pour une durée limitée au strict nécessaire, mais renouvelable en cas de persistance de la menace.... ,,Il ressort en outre du
point 135 de cet arrêt que la responsabilité des Etats membres en matière de sécurité nationale, au sens du droit de l'Union,
correspond à l'intérêt primordial de protéger les fonctions essentielles de l'Etat et les intérêts fondamentaux de la société, et
inclut la prévention et la répression d'activités de nature à déstabiliser gravement les structures constitutionnelles, politiques,
économiques ou sociales fondamentales d'un pays, et en particulier à menacer directement la société, la population ou l'Etat en
tant que tel, telles que notamment des activités de terrorisme.,,,1) Ni l'article L. 34-1 du code des postes et des communications
électroniques (CPCE) ni l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 ne prévoient un réexamen périodique, au regard des
risques pour la sécurité nationale, de la nécessité de maintenir l'obligation faite aux personnes concernées de conserver les
données de connexion. Ces articles, ainsi, par suite, que l'article R. 10-13 du CPCE et le décret n° 2011-219 du 25 février 2011,
en tant qu'ils ne subordonnent pas le maintien en vigueur de cette obligation au constat, à échéance régulière, qui ne saurait
raisonnablement excéder un an, de la persistance d'une menace grave, réelle et actuelle ou prévisible, pour la sécurité nationale
sont, dans cette mesure, contraires au droit de l'Union européenne.... ,,Il résulte de ce qui précède que, s'agissant de l'objectif de
sauvegarde de la sécurité nationale, le refus d'abroger l'article R. 10-13 du CPCE et l'article 1er du décret du 25 février 2011 doit
être annulé en tant seulement que leurs dispositions ne prévoient pas un réexamen périodique de l'existence d'une menace
grave, réelle et actuelle ou prévisible pour la sécurité nationale, s'agissant des données qu'elles mentionnent autres que celles
afférentes à l'identité civile, aux comptes et aux paiements des utilisateurs et aux adresses IP.... ,,Il y a lieu d'enjoindre au
gouvernement de compléter ces dispositions dans un délai de six mois à compter de la présente décision.... ,,2) Il ressort des
pièces du dossier que la France est, à la date de la présente décision, confrontée à une menace grave, réelle et non seulement
prévisible mais actuelle pour sa sécurité nationale, appréciée au regard de l'ensemble des intérêts fondamentaux de la Nation
listés à l'article L. 811-3 du code de la sécurité intérieure (CSI) qui, par son intensité, revêt un caractère grave et réel. Cette
menace est, à la date de la présente décision, non seulement prévisible mais aussi actuelle.,,,Cette menace procède d'abord de
la persistance d'un risque terroriste élevé, ainsi qu'en témoigne notamment le fait que sont survenues sur le sol national au cours
de l'année 2020 six attaques abouties ayant causé sept morts et onze blessés.... ,,Par ailleurs, la France est particulièrement
exposée au risque d'espionnage et d'ingérence étrangère, en raison notamment de ses capacités et de ses engagements
militaires et de son potentiel technologique et économique.... ,,La France est également confrontée à des menaces graves pour
la paix publique, liées à une augmentation de l'activité de groupes radicaux et extrémistes.,,,Dans la mesure où il résulte de la
présente décision que la réalité et la gravité de la menace pesant sur la sécurité nationale justifient l'obligation de conservation
généralisée et indifférenciée de l'ensemble des données de connexion à cette fin, les opérateurs ne sauraient, avant l'expiration
du délai de six mois laissé au Gouvernement pour compléter les dispositions litigieuses, se soustraire à cette obligation et aux
sanctions dont sa méconnaissance est assortie au motif que la durée de l'injonction qui leur est faite n'a pas été limitée dans le
temps par le pouvoir réglementaire.
54-07-01-04-04-04 La contrariété d'une disposition législative aux stipulations d'un traité international ou au droit de l'Union
européenne ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre un acte réglementaire que si ce dernier a
été pris pour son application ou si en elle constitue la base légale.
54-07-023 Les articles L. 851-1, L. 851-2, L. 851-4 et le IV de l'article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure (CSI) relatifs aux
modalités d'accès des services de renseignement aux données de connexion méconnaissent le droit de l'Union européenne,
faute pour la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) de disposer d'un pouvoir d'avis
conforme.,,,L'annulation des décrets attaqués en tant qu'ils permettent l'application de ces dispositions sans contrôle préalable
par une autorité administrative indépendante dotée d'un pouvoir d'avis conforme ou une juridiction, en dehors des cas d'urgence

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