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souveraineté face à des menaces et à des manœuvres agressives, et celle de nos
agents contre le risque de mise en cause que provoque l’insécurité juridique qui
entoure actuellement certaines de leurs activités. Ce sera une loi élaborée par une
démocratie lucide et consciente des risques, qui n’entend ni transiger avec ses
principes fondateurs, ni renoncer à assurer sa sécurité et la défense de ses intérêts
fondamentaux. C’est pourquoi la volonté du Gouvernement est de travailler de
concert avec le Parlement, dans un esprit de responsabilité et avec le souci de
parvenir à un consensus. C’est l’honneur d’une grande démocratie comme la nôtre
que d’organiser ainsi un tel débat ; la volonté d’écoute mutuelle nous permettra
d’aboutir au meilleur texte possible.
Avant d’en venir aux principales mesures prévues par le texte et aux
garanties qu’il offre en matière de protection des libertés publiques, je voudrais
exposer les raisons qui ont présidé à sa conception. Je m’en tiendrai naturellement
aux aspects de la loi qui concernent le renseignement intérieur, laissant à JeanYves Le Drian, puis à Christiane Taubira le soin de vous exposer ceux qui
relèvent du renseignement extérieur et du domaine de la justice.
Tout d’abord, cette loi de maturité vient couronner un long processus de
réforme de notre politique du renseignement, engagé par les gouvernements
successifs afin de rendre celle-ci plus efficace, plus cohérente et même – dans
toute la mesure du possible compte tenu des matières traitées – plus transparente.
Ainsi, depuis 2007, une « communauté du renseignement » a été définie, et
plusieurs institutions nouvelles, créées : la délégation parlementaire au
renseignement (DPR) en 2007, le Conseil national du renseignement et la fonction
de coordonnateur national du renseignement en 2009, l’Académie du
renseignement en 2010, et enfin l’Inspection des services du renseignement en
2014.
Dans la continuité de ces innovations, le texte soumis à votre examen vise
à préciser et à moderniser notre législation en la matière – lacunaire et devenue à
certains égards obsolète au fil des ans. Pour le préparer, nous nous sommes
appuyés sur le travail important réalisé en 2013 par la mission d’information sur
l’évaluation du cadre juridique des services de renseignement, conduite par JeanJacques Urvoas et Patrice Verchère, que je remercie l’un et l’autre. Les travaux de
cette mission ont été par la suite confortés par ceux de la délégation parlementaire
au renseignement.
Le texte de loi définit le périmètre des services des ministères de
l’Intérieur, de la Défense et des Finances autorisés à disposer des techniques de
renseignement et précise les sept grands objectifs qui justifient qu’il y soit
recouru : la sécurité nationale ; la défense des intérêts économiques et
scientifiques essentiels de la France ; la prévention du terrorisme ; la prévention de
la criminalité et de la délinquance organisées ; la prévention de la reconstitution
ou du maintien de groupements armés dissous en application de la loi du
10 janvier 1936 ; la défense des intérêts essentiels de notre politique étrangère et
l’exécution des engagements européens et internationaux de la France ; enfin, la