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certains points aux dispositions générales du code de justice administrative (CJA),
afin de concilier le droit au recours effectif, garanti par l’article 6-1 de la
convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et les
exigences du secret de la défense nationale et de la doctrine du renseignement.
1. La nécessaire conciliation du respect du droit au recours effectif et
des exigences de protection de la sécurité nationale
L’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales consacre le droit de toute personne à un
procès équitable, ce qui emporte le respect des principes du contradictoire, de
l’égalité des armes et de la publicité des débats, mais il peut néanmoins être
aménagé dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale
dans une société démocratique (1).
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a ainsi jugé que,
même dans les instances impliquant une décision sur une accusation en matière
pénale, le droit à un procès pleinement contradictoire peut être restreint dans la
mesure strictement nécessaire à la sauvegarde d’un intérêt public important tel que
la sécurité nationale, la nécessité de garder secrètes certaines méthodes policières
de recherche des infractions ou la protection des droits fondamentaux d’autrui. En
ce qui concerne les dispositions limitant la communication des informations
interceptées, la Cour a rappelé que le droit à la divulgation des preuves pertinentes
n’est pas absolu. Les intérêts de la sécurité nationale ou la nécessité de garder
secrètes certaines méthodes d’enquête en matière pénale doivent être mis en
balance avec le droit général à une procédure contradictoire (2).
Suivant le même raisonnement, la Cour européenne des droits de l’homme
a déjà admis la possibilité de tenir des audiences à huis-clos pour des motifs de
sécurité nationale et de limiter l’étendue de l’obligation de motivation des
décisions selon la nature de la décision et à la lumière des circonstances en cause,
l’organe de contrôle pouvant à bon droit se borner à informer le requérant
qu’aucune décision n’a été rendue, selon un mécanisme de non-confirmation, noninfirmation (3).
S’agissant d’une procédure juridictionnelle portant sur des mesures de
surveillance secrètes, la Cour a également admis qu’il est nécessaire de dissimuler
(1) Article 6-1 de la CESDH : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement,
publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui
décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute
accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès de
la salle d’audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès
dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique,
lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la
mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité
serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice. »
(2) CEDH, 27 octobre 2004, Edwards et Lewis c. Royaume-Uni, n° 39647/98 et 40461/98, § 46.
(3) CEDH, 9 décembre 1994, Ruiz Torija c. Espagne, n° 18390/91 § 29.