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En effet, si le contrôle parlementaire des activités de renseignement existe
en France depuis la loi n° 2007-1443 du 9 octobre 2007 portant création d’une
délégation parlementaire au renseignement (DPR) (2), le Conseil constitutionnel
considère traditionnellement que le Parlement ne peut connaître des opérations en
cours des services secrets (3). La DPR ne peut donc exercer qu’un contrôle a
posteriori de l’action du Gouvernement en matière de renseignement.
De même, si l’article 66 de la Constitution confie une compétence
exclusive au juge judiciaire pour veiller au respect de la liberté individuelle,
celle-ci n’a vocation à s’appliquer qu’aux détentions et privations de liberté
arbitraires dans le cadre de la procédure pénale conformément à une jurisprudence
constante du Conseil constitutionnel depuis 1999 (4) (plus de 30 décisions).
Le juge constitutionnel établit d’ailleurs une distinction entre la police
judiciaire, dédiée à la répression d’une infraction ainsi qu’à la recherche de ses
auteurs, et la police administrative qui a pour but de « faire cesser un trouble déjà̀
né, fût-il constitutif d’infraction, et [de concourir à] la prévention des
infractions ». Dès lors, si les moyens octroyés dans le cadre de la police judiciaire
sont soumis à l’autorisation du juge judiciaire, les moyens prévus dans le cadre de
la seconde activité relèvent de la responsabilité du seul pouvoir exécutif (5).
En matière de police administrative douanière, deux décisions récentes
illustrent cette jurisprudence. Dans une décision du 27 janvier 2012, le Conseil
constitutionnel y juge que le droit de communication prévu par l’article 65 du
code des douanes (6) ne relève pas des privations de liberté et n’affecte pas la
(1) Voir, dans l’étude d’impact du projet de loi, la présentation du modèle italien du contrôle légal des activités
de renseignement et le rôle confié à la commission parlementaire pour la sécurité de la République
(COPASIR).
(2) Dont les pouvoirs ont été étendus par l’article 12 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la
programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la
défense et la sécurité nationale.
(3) Conseil constitutionnel, décision n° 2001-456 DC, 27 décembre 2001, Loi de finances pour 2002,
(considérants 42 à 45).
(4) Conseil constitutionnel, décision n° 99-411 DC du 16 juin 1999, loi portant diverses mesures relatives à la
sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs,
(considérant 20), décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011, Loi d’orientation et de programmation pour la
performance de la sécurité́ intérieure, (considérant 59).
(5) Conseil constitutionnel, décision n° 2005-532 DC du 19 janvier 2006, Loi relative à la lutte contre le
terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers (considérant 5).
(6) En vertu de l’article 65 du code des douanes, certains agents des douanes peuvent exiger la communication
de papiers et de documents de toute nature relatifs aux opérations intéressant leur service. Ce droit de
communication peut s’exercer dans les gares de chemin de fer, dans les locaux des compagnies de
navigation maritimes et fluviales et chez les armateurs, consignataires et courtiers maritimes, dans les
locaux des compagnies de navigation aérienne, dans les locaux des entreprises de transport par route, dans
les locaux des agences, y compris celles dites « de transports rapides » et de la livraison de tous colis, chez
les commissionnaires ou transitaires, chez les concessionnaires d’entrepôts, docks et magasins généraux,
chez les destinataires ou les expéditeurs réels des marchandises déclarées en douane, chez les opérateurs
de télécommunications et les prestataires mentionnés aux 1et 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du
21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, pour les données conservées et traitées par ces
derniers, dans le cadre de l’article L. 34-1 du code des postes et télécommunication, et chez toutes les
personnes physiques ou morales directement ou indirectement intéressées à des opérations régulières ou
irrégulières relevant de la compétence du service des douanes.