CNCIS - Dixième anniversaire de la Commission
La grande nouveauté technique et économique du moment tient au
téléphone mobile : sur la base de la nouvelle loi, deux arrêtés du 18 mars
1991 autorisent France Télécom et la Société française de radiotéléphonie à
exploiter un service numérique GSM dans la bande de fréquence des
900 MHz. En passant du fil à l’onde, le téléphone change de dimension : aujourd’hui, il y a plus d’abonnés au téléphone mobile qu’au téléphone fixe. Du
même coup, les problèmes pratiques de sécurité, de confidentialité et d’interception changent eux aussi de dimension.
Mais c’est l’étape suivante qui est décisive pour l’essor des opérateurs « alternatifs » à l’« opérateur historique », comme on désigne couramment France Télécom. Elle résulte de la loi du 26 juillet 1996 de
réglementation des télécommunications. Si l’établissement et l’exploitation
des réseaux ouverts au public restent soumis à autorisation ministérielle,
celle ci n’a plus rien de dérogatoire : elle ne peut être refusée que pour les
motifs strictement énumérés par le nouvel article L. 33-1 du code des postes
et télécommunications. L’établissement des autres réseaux est soit soumis
à autorisation de la nouvelle Autorité de régulation des télécommunications
(réseaux indépendants de l’article L. 33-2), soit libre (L. 33-3).
Les services bénéficient de la même libéralisation : la fourniture du
service téléphonique au public dépend toujours d’une autorisation ministérielle (article L. 34-1), mais celle des autres services est libre (article L. 34-2),
sauf exceptions (articles L. 34-3 et L. 34-4).
Dès lors, la concurrence devient effective. Le dernier monopole de fait
dont disposait France Télécom (transformée en entreprise nationale) a disparu en 2001 avec le dégroupage de la boucle locale : désormais, tout opérateur à la possibilité d’accéder directement aux équipements terminaux
des abonnés.
Ce foisonnement de dizaines d’opérateurs a bien sûr des effets sur
l’application de la loi de 1991. À certains égards, il est sans doute plus difficile que naguère d’intercepter, légalement ou non, toutes les correspondances des abonnés, qui peuvent les échanger par des voies diverses,
téléphone fixe, téléphone mobile, télécopie, mail... À d’autres égards, la
tâche de l’autorité judiciaire et de la CNCIS est devenue plus délicate : au lieu
d’un interlocuteur unique et bien connu d’elles, elles en ont un grand
nombre, qu’elles connaissent moins et qui les connaissent moins bien.
Il faut compter aussi avec les progrès des moyens d’interception, de
plus en plus sophistiqués, peu coûteux et faciles à acquérir (et, paraît-il, souvent faciles à utiliser). Il n’y a en effet guère d’illusion à nourrir sur l’efficacité
du mécanisme de contrôle prévu par les articles 226-3 et R. 226-1 et suivants
du code pénal.
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