Contributions
des formations politiques dites démocratiques Les seules discussions de
principe dont je me souvienne ont concerné des écoutes sur des cibles légitimes du service, faisant apparaître de manière indirecte et inattendue,
comme utilisateurs de la ligne, des hommes politiques, des fonctionnaires
ou des personnalités connues.
Beaucoup étaient de bonne foi, d’autres n’auraient sans doute jamais
dû apparaître ! Le cabinet, voire le ministre lui-même saisi de ces cas, ont
toujours tranché en fonction du seul intérêt réel et légitime, pour le service,
des écoutes en cause. Il faut dire aussi qu’en 1988/1990, et ceci est à mettre
au crédit des alternances et de la cohabitation, les sensibilités politiques variées des fonctionnaires empêchaient, de fait, toute utilisation partisane.
Dans les services, la loi du 10 juillet 1991, que le contexte sociologique et politique de l’époque rendait inévitable (polémique sur les fichiers
de la DCRG en 1988/1990, condamnation de la France par la Cour Européenne des Droits de l’homme ayant jugé insuffisante la base légale des
écoutes administratives...) a d’abord été perçue comme un handicap avant
que la pratique ne rende la situation tout à fait acceptable voire même plus
confortable en terme de responsabilité des fonctionnaires.
Avant sa promulgation, les fonctionnaires concernés percevaient
d’abord la future loi comme une méfiance à leur égard. Je crois que ce sentiment, qui laissait filtrer un peu d’amertume, était plus fort à la DST, compte
tenu des activités du service exclusivement orienté vers la protection du territoire (contre-espionnage, contre-ingérence économique, lutte anti-terroriste)
qu’aux RG où la collecte de renseignements de nature politique et sociale ne
peut être complètement étrangère aux contingences gouvernementales du
moment. La fixation d’une règle de jeu claire pouvait arranger tout le monde.
Le deuxième sentiment était la crainte que les activités d’écoutes
soient fortement réduites par une commission présumée peu au fait de ces
questions. Le troisième sentiment se traduisait par les craintes de lourdeurs
administratives résultant des dispositions de la loi concernant les formalités
des enregistrements, les délais de conservation de ceux-ci et des transcriptions. Rarement exprimé, mais bien présente, figurait enfin la crainte d’un
manque de confidentialité de la part des élus siégeant à la Commission de
contrôle, spontanément soupçonnés d’être peu discrets au profit de leurs
amis politiques ou de leurs ambitions politiques. Cette suspicion était totalement infondée.
Après quelques tâtonnements, qui ont fait l’objet de discussions parfois directes mais toujours ouvertes avec le président Bouchet, il est apparu
que la plupart des craintes n’avaient pas lieu d’être et les ajustements nécessaires ont été opérés. Les services, en tout cas la DST puisque j’en avais été
nommé directeur avant le 10 juillet 1991, ont compris la nécessité de mieux
motiver leurs demandes et la Commission a parfaitement admis une certaine souplesse. En matière terroriste par exemple, où la mémoire du service a joué un rôle majeur dans le succès, la conservation des transcriptions
d’interception a été acceptée au-delà de la date de résolution de certaines
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