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coopération spatiale. Or sans stratégie commune entre Français et
Allemands, aucun progrès européen substantiel ne pourra avoir lieu.
Un indicateur supplémentaire de cette rivalité est apparu lors de la
dernière conférence ministérielle de l’Agence spatiale européenne, en
novembre 2019. La France y a en effet perdu sa place de leader spatial
historique en Europe avec 2,66 milliards d'euros de contribution (18,5 % du
budget de l'ESA). Elle a été très largement distancée par l'Allemagne
(3,29 milliards d'euros, soit 22,9 % du budget de l'ESA) sur un total de
14,38 milliards d'euros pour la période 2020-2025. Paris reproche à Berlin de
lui avoir fait une mauvaise manière en cachant l’intention du gouvernement
allemand. Avec 22,9 %, l'Allemagne est désormais le premier contributeur de
l'ESA, suivie de la France (18,5 %, 2,66 milliards d'euros), de l'Italie (15,9 %,
2,28 milliards d'euros) et du Royaume-Uni (11,5 %, 1,65 milliard d'euros).
Mais la rivalité n’est pas seulement franco-allemande. La France se
trouve aussi talonnée par l'Italie qui contribue à hauteur de 15,9 % au budget
de l’ESA. En conséquence, l'ambition de la France sera forcément en recul
par rapport à la stratégie de ses deux voisins européens. L’Allemagne et
l’Italie, à la fois rivaux et partenaires de la France ont fait le choix d’investir
des sommes importantes sur des programmes, d'avenir. L’Italie s’est
également positionnée sur le marché des lanceurs, avec Vega V, aujourd’hui
complémentaire d’Ariane 6, mais qui porte aussi en lui les germes d’une
concurrence future.
Au final, il s’agit à présent de fixer le bon point d’équilibre entre une
concurrence vertueuse à l’échelle européenne, car source d’innovation, et la
définition d’intérêts stratégiques communs qui sous-tendent une approche
partenariale pérenne au service d’une autonomie stratégique. Ce qui est
certain c’est que face aux Américains et aux Chinois, aucun des grands pays
européens (France, Allemagne, Italie, Royaume-Uni) ne peut rester une
puissance spatiale sans s’allier plus étroitement aux autres, y compris au
plan industriel. Mais il est nécessaire pour cela, de s’accorder sur une réelle
ambition européenne, qui pourrait utilement s’appuyer sur une initiative
franco-allemande de nature à restaurer un climat de confiance entre nos
deux pays.
Recommandation n° 52 : Restaurer un climat de confiance
franco-allemand en élaborant une feuille de route commune au service
d’une ambition spatiale commune européenne.
b) L’ambition
Il existe aujourd’hui trois niveaux de décision à l’échelle
européenne : celui de l’agence spatiale européenne intergouvernementale,
celui des agences nationales comme le CNES français ou le DLR allemand et
le niveau communautaire qui se développe depuis les années 2000.

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