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1. Le renseignement pénitentiaire : une pratique ancienne
Le renseignement pénitentiaire existe depuis longtemps dans notre
administration, mais il se pratiquait, depuis les années 80, « à la bonne
franquette » selon l’expression employée par M. Sébastien Nicolas, secrétaire
général du Syndicat national pénitentiaire Force Ouvrière, lors de son
audition à l’Assemblée nationale le 21 mars 2019 par la commission
d’enquête parlementaire sur « la situation, les missions et les moyens des forces
de sécurité ». Une quinzaine de personnes seulement étaient jusqu’alors
chargées de traiter les informations transmises par les établissements
pénitentiaires.
Il faut remonter à un arrêté du 7 janvier 2003 sur l’organisation de la
direction de l’administration pénitentiaire pour trouver trace de la création
formelle d’un « bureau du renseignement pénitentiaire » au sein de la sousdirection de l’état-major de sécurité. L’article 4 dudit arrêté définit ainsi les
missions de ce bureau : « chargé de recueillir et d’analyser l’ensemble des
informations utiles à la sécurité des établissements et des services pénitentiaires, il
organise la collecte de ces renseignements auprès des services déconcentrés et
procède à leur exploitation à des fins opérationnelles. Il assure la liaison avec les
services centraux de la police et de la gendarmerie ».
Quelques semaines à peine après la publication de cet arrêté, deux
évasions spectaculaires à l’arme lourde défrayaient la chronique dans les
prisons de Borgo (Corse) et de Fresnes (Val-de-Marne) qui devaient conduire
le Gouvernement de l’époque à prendre des mesures de renforcement de la
sécurité dans les prisons.
Dans ce contexte, le Bureau du renseignement pénitentiaire a
d’abord eu pour objectif d’assurer une surveillance des détenus dits
difficiles, avant de voir sa mission étendue, après les attentats de Londres et
de Madrid en 2005, aux phénomènes de radicalisation. Néanmoins, le
renseignement pénitentiaire n’a disposé, jusqu’à une période récente, que de
moyens matériels et humains très limités.
Avec les attentats commis par Mohamed Merah en 2012 puis ceux de
janvier et novembre 2015, le renforcement du renseignement pénitentiaire a
fait l’objet de nombreuses discussions et de controverses politiques, tant la
question de la radicalisation en prison a été au cœur du débat public et
demeure un sujet de préoccupation majeur aussi bien pour les autorités
politiques que pour l’opinion publique.
2. La création du BCRP en 2017…
Le Bureau du renseignement pénitentiaire, dans sa forme et son
fonctionnement datant de 2003, a été réorganisé en 2015. Depuis la loi
n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le