La Cour considère en effet que les autorités n’ont pas ménagé un juste équilibre entre, d’une
part, le droit des requérants au respect de leur vie privée et, d’autre part, l’objectif de protection
de la santé publique poursuivi par le procureur (CEDH 6 juin 2013, Avilkina et a. c. Russie, n°
1585/09).
2.
NECESSITE DE LEGIFERER ET OBJECTIFS POURSUIVIS
En l’état du droit, l’autorisation de mise en œuvre des techniques de recueil de renseignement,
telle qu’encadrée par les articles L. 821-2 et suivants du code de la sécurité intérieure, est
délivrée à un service de renseignement donné, au titre d’une ou plusieurs finalités figurant dans
les missions de ce service, pour une ou plusieurs techniques dont la mise en œuvre est autorisée
par la loi pour la finalité poursuivie, et pour des motifs expressément précisés.
Le recueil de renseignements sur le fondement de l’une des techniques du livre VIII est donc
subordonné à un triple encadrement destiné à garantir la proportionnalité de l’atteinte à la vie
privée : l’autorisation de mise en œuvre délivrée par le Premier ministre désigne la ou les
finalités poursuivies, la technique autorisée et le service chargé de la mettre en œuvre.
Une fois collectés, si les renseignements s’avèrent utiles à d’autres finalités et à d’autres
services, les intérêts fondamentaux de la Nation peuvent justifier voire commander la
transmission de ces renseignements, ce qui suppose nécessairement de sortir du cadre
initialement fixé pour la mise en œuvre de la technique ayant permis leur recueil.
Ainsi, par exemple, si la mise en œuvre d’une technique de recueil de renseignement au titre de
la finalité de prévention de la criminalité organisée (6° du L. 811-3) aboutit au recueil de
renseignements pertinents au regard de la finalité de prévention du terrorisme (4° du L. 811-3),
il appartient au service qui a recueilli ces renseignements de les transmettre aux services de
renseignement qui concourent à la lutte contre le terrorisme.
Une telle possibilité est déjà induite par la loi. En effet, en posant un principe d’interdiction des
extractions ou des transcriptions sans rapport avec l’une des finalités de l’article L. 811-3 (et
non avec la finalité ayant justifié l’autorisation de mettre en œuvre la technique de
renseignement), le premier alinéa de l’article L. 822-3 permet déjà de transcrire et d’exploiter
des renseignements recueillis au titre d’une finalité mais s’avérant ensuite correspondre à
d’autres finalités énumérées à l’article L 811-3 ; d’autre part, l’article L. 863-2 permet que les
services de renseignement partagent entre eux ces renseignements, comme toute autre
information utile à leurs missions.
Ceci étant, les dispositions du premier alinéa de l’article L. 863-2 apparaissent superfétatoires
dans la mesure où le simple dialogue entre services de renseignements n’a pas à être
spécifiquement encadré, alors qu’elles n’apportent en revanche, par elles-mêmes, aucune
précision s’agissant de l’encadrement des échanges de renseignements collectés par la mise en
œuvre d’une technique de recueil de renseignement.
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