- 357 -
sécurité et la protection de la liberté. Faut-il aussi défendre la liberté du renard
dans le poulailler ?
M. Philippe Chadrys. – Nous ne faisons pas de surveillance de
masse, mais ciblons notre action sur certains profils ou sites. On constate en
effet que dans 99 % des affaires de terrorisme djihadiste que nous traitons,
Internet est utilisé comme vecteur, sous une forme ou sous une autre. Nous
observons par ailleurs que de nombreux jeunes font leur culture religieuse
exclusivement sur Internet ; très rapidement, en cliquant de site en site et de
lien en lien, ils se retrouvent sur des sites djihadistes et, à partir d’un simple
profil Facebook, se retrouvent en lien avec des terroristes. Certains organes de
propagande de groupes terroristes ne vivent que grâce à des plateformes qui
n’embrassent bien sûr pas les thèses djihadistes, mais dont les contenus se
justifient par la liberté du net. Elles permettent ainsi à des contenus
propagandistes d’exister et de se diffuser – c’est un simple constat, qui
n’emporte pas de jugement de valeur.
J’en viens à votre question sur la collaboration entre les services de
police. Pour les attentats de début janvier, trois services ont été saisis − la police
judiciaire, la police judiciaire de Paris et la DGSI – et ont travaillé ensemble,
sans difficulté, notamment sur Internet. Les renforts annoncés seront bien sûr
les bienvenus, mais n’oublions pas que nos besoins de recrutement concernent
surtout des compétences pointues sur les technologies de communication et de
vrais spécialistes.
M. Jérémy Zimmermann. – Monsieur Vergoz, j’apprécie votre main
tendue et je la saisis au vol. Vous qualifiez mes propos d’excessifs, vous y avez
noté l’ironie que j’y ai volontairement placée peut-être par agacement
d’entendre les mêmes débats qui instrumentalisent les peurs pour éviter de se
poser des questions fondamentales et coûteuses au profit d’affichage politique.
Ce que je trouve excessif, moi, c’est la façon dont on décrédibilise
souvent les discours portant sur les libertés fondamentales, tenus par ces
« droits-de-l’hommistes ». Ce que je trouve excessif, c’est l’empilement de lois
sécuritaires depuis quinze ans qui n’ont pas permis d’empêcher ces attentats.
Ce que je trouve excessif, c’est l’emploi de la censure à tort et à travers des sites.
Je parle bien de la censure car selon votre raisonnement, à partir du moment où
quelques-uns pourraient échapper à la censure alors il n’y aurait pas de
censure. Donc la Chine ne censure pas Internet. Donc l’Iran ne censure pas
Internet. Donc le Pakistan ne censure pas Internet. Pour moi, lorsque l’exécutif
prend la décision de rendre certains contenus inaccessibles, c’est la définition de
la censure. Le blocage administratif n’est ni plus ni moins que de la censure.
C’est la censure que je trouve excessive car en aucun cas, elle ne peut être
proportionnée.
M. Jean-Yves Leconte. – Normalement la censure est efficace. Or là
vous faites croire aux gens que ce que vous appelez censure est efficace. Or, ça
ne l’est pas.