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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE

Vous avez manié l’ironie et le cynisme à dessein et vous m’avez
choqué. Vous dites que certains terroristes sont bêtes. Je ne suis pas d’accord. Et
ils sont méchants, ce sont des terroristes. Nous devons protéger nos
concitoyens. Vous semblez proposer une solution qui n’est pas liberticide. Mais
j’ai du mal à comprendre : où vous situez-vous ?
M. André Gattolin. – Je voudrais rappeler que dans le cadre de la
commission des affaires européennes du Sénat, Colette Mélot et moi-même
avons été chargés d’une étude sur la place d’Internet dans la lutte contre le
terrorisme en Europe. Cette mission s’inscrit dans un ensemble de six groupes
de travail qui ont pour but de faire des propositions pour renforcer la lutte
contre le terrorisme en Europe.
Comme Jérémy Zimmermann, j’ai des grosses inquiétudes sur le
profilage de masse. Je pense qu’il faut désormais s’orienter vers plus de
qualitatif, un travail plus ciblé. Par ailleurs, le discours sur l’auto-régulation et
la gouvernance d’Internet, c’est l’absence de politique ! Quand j’ai vu les
Anonymous attaquer en masse des sites djihadistes, au nom de cette pseudo
auto-gouvernance, je me suis inquiété. Internet permet en effet de surveiller et
de capter un certain nombre d’informations sur les terroristes, mais on a perdu
une source précieuse d’informations dans cette affaire.
Le terme de « cyberterrorisme » m’agace beaucoup. On confond
l’action de terroristes qui se servent d’Internet pour faire passer leur message,
les propagandistes (la « média-courroie de transmission », comme disait
Lénine), et la question de la cybersécurité. Or, cette dernière me parait très
importante.
Une société de ma circonscription, SIFARIS, assure la cybersécurité
de Charlie Hebdo. J’étais dans les locaux peu après les attentats du 9 janvier et
les attaques cyber se sont multipliées à un tel point que le prestataire hébergeur
américain qui permettait de tenir les flux a jeté l’éponge.
D’une manière plus générale, on sait aujourd’hui qu’il y a un certain
nombre d’attaques contre différents médias, mettant en cause leur capacité à
diffuser de l’information. La multiplication de ces attaques pose la question de
la liberté de la presse que nous devons défendre. Et cela passe peut-être par le
fait d’assurer la cybersécurité des organes de presse.
Faisons attention aux mots que l’on emploie. Aujourd’hui, on accuse
Internet comme on accusait les radios libres dans les années 80. Mais arrêtons
de tirer sur les réseaux sociaux. Internet doit être encadré juridiquement comme
tout autre secteur et je me retrouve dans les propos très pondérés de Marc
Robert.
M. Michel Boutant. – Je m’exprime en tant que non spécialiste
d’Internet. J’y trouve bien sûr beaucoup d’utilité, mais je comprends aussi que
l’on puisse y voir, comme le disait Ésope, la meilleure et la pire des choses. La
question centrale est celle de savoir où placer le curseur entre la garantie de la

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