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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE
mesure, les jeunes, savent déjà utiliser des outils de contournement, comme les
VPN, un proxy ou TOR. Ils le font déjà pour contourner la HADOPI ou pour
utiliser Netflix avant son arrivée en France.
Cela pourrait d’ailleurs être contreproductif. Cela pousserait à la
clandestinité et rendrait le travail des enquêteurs plus difficile. Ces mesures
sont inadaptées au regard du nombre restreint de sites de recrutement. Nous
nous interrogeons sur la possibilité de se passer de l’office du juge alors qu’il
existe des mesures d’urgence. Concernant les réseaux sociaux, nous pensons
qu’il est illusoire de bloquer ces messages, sauf à recourir à un traitement massif
et automatisé inenvisageable dans un État de droit.
Ces mesures sont potentiellement attentatoires aux libertés
fondamentales en se passant des garanties du juge. Selon un juge antiterroriste,
le caractère manifestement illicite des contenus est délicat à apprécier,
notamment pour les textes écrits. On risque d’incriminer ce qui relève du délit
d’opinion. Nous ne sommes pas opposés par principe au blocage, seulement au
blocage comme seule solution et sans recours préalable au juge judiciaire. La
multiplication des dispositifs de renforcement des dispositions antiterrorisme
notamment sur Internet appelle une évaluation de l’efficacité des dispositifs de
blocage.
Yann Bonnet, rapporteur général du Conseil national du
numérique. – Enfin, nous vous proposons cinq pistes d’action.
En préalable, nous pensons qu’il faut mieux comprendre les
processus sociaux complexe de la radicalisation et de préciser le rôle d’Internet.
À cette fin, on pourrait créer un observatoire permanent qui regrouperait des
acteurs du web, des associations de victimes, des sociologues et des experts. La
création de ces commissions d’enquête prouve bien que ces mécanismes ne sont
pas suffisamment connus.
Nous pensons qu’il est essentiel de nourrir un contre-discours, en
s’appuyant sur la force de diffusion d’Internet. Nous avons rencontré
l’association française des victimes du terrorisme qui réalise des vidéos qui
donnent la parole aux victimes. Ces vidéos sont diffusées sur Internet,
empruntant les mêmes canaux que la propagande. Il faut investir l’espace
numérique. Il faut donner des armes de compréhension et des décryptages, à la
manière de ce que fait le Gouvernement américain et, depuis aujourd’hui, le
Gouvernement français. Il faut déconstruire la parole radicale sur Internet. On
peut investir les plateformes internet par du contre-discours. On pourrait
envisager une mobilisation des acteurs du Web, notamment les plateformes et
les moteurs de recherche, pour soutenir les initiatives de contre-discours, à
l’instar de ce qui a été réalisé il y a quelques mois avec les sites anti-IVG. Il faut
étudier le financement d’espaces et de vidéos pédagogiques.
Parallèlement, on doit approfondir le travail sur l’éducation. On doit
améliorer les discours de prévention auprès des futures générations. Il ne faut
plus de discours verticaux mais faire des gens des acteurs de la prévention. Il