- 32 -
FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE
– notamment la Turquie, l’Arabie Saoudite et l’Iran – puissent entamer un
rapprochement, en lien avec la communauté internationale.
Or, les rapports entre les forces en présence, qui poursuivent des
intérêts parfois contradictoires, ont pu évoluer dans les dernières années, ce
qui rend complexes et mouvantes l’analyse de la situation comme
l’identification des marges de manœuvre.
Si la Turquie et l’Arabie Saoudite souhaitent toutes deux la chute du
régime de Bachar el-Assad, les deux pays restent opposés quant au rôle des
Frères musulmans. Par ailleurs, le positionnement de la Turquie, qui pouvait
apparaître comme étant plus soucieuse – au moins jusqu’à une période
récente – de la question kurde que de la progression de Daech, apparaît
complexe. L’ambiguïté perdure en outre quant aux relations de l’Arabie
Saoudite et du Qatar avec les réseaux salafistes.
Il semble par ailleurs que les discussions récemment ouvertes entre
l’Iran et les États-Unis sur la lutte contre le terrorisme pourraient encore
modifier les rapports de force, de même que les événements en cours au
Yémen.
Enfin, la coopération des différents pays de l’Union européenne sur
ces questions n’est pas toujours évidente, à la fois au sein de l’Union et avec
les pays du bassin méditerranéen. Elle doit être renforcée, le cas échéant par
le biais de partenariats euro-méditerranéens.
(2) Un terreau fertile pour le développement des groupes islamistes et
l’émergence de Daech
La prééminence de Daech ne doit pas masquer le fait qu’il existe
divers groupes islamistes rivaux dans la zone, et autant de projets
djihadistes, qui se distinguent davantage par leur conception politique que
par leur doctrine religieuse.
Parmi les groupes islamistes menant l’insurrection sur le territoire
irakien figurent notamment l’Armée islamique en Irak, numériquement très
importante, et opposée aux Kurdes de l’Armée des partisans de la sunna.
Surtout, l’Unicité et le djihad, fondée dès les années 1990, a pris en 2006 la
forme d’un « émirat virtuel et terroriste »1 sous le nom d’État islamique d’Irak.
Croissant d’abord dans l’ombre d’Al-Qaïda, il s’en est cependant peu à peu
émancipé pour constituer un pôle d’attraction original et autonome. C’est de
ce groupe que naquit en 2013 l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL),
désigné par son acronyme arabe Daech, sous le commandement d’Abû Bakr
al-Baghdâdî.
O. Hanne et Th. Flichy de La Neuville, ouvrage précité. Le titre d’émir, ou « commandant » en
arabe, renvoie à celui des gouverneurs provinciaux dans l’empire islamique du Moyen Âge.
1