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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE
septembre 2005, ont jeté le discrédit sur la légitimité d’un gouvernement qui
coopère avec les États-Unis. L’aide occidentale à la reconstruction du pays a
d’ailleurs principalement concerné les installations pétrolières, au profit des
entreprises américaines. En 2010, les manœuvres d’al-Maliki pour contrer la
victoire dans les urnes de la liste Iraqyia, portée par l’ancien premier
ministre laïque Iyad Allaoui, constituent un affront supplémentaire. Surtout,
même après le départ des troupes américaines à la fin de l’année 2011,
l’autoritarisme d’al-Maliki et le traitement extrêmement répressif qu’il lui
réserve alimente chez la minorité sunnite le sentiment d’une humiliation
et d’une persécution, favorisant ainsi l’extrémisme religieux et le
ralliement des tribus aux groupuscules dont est issu Daech.
Dans ce contexte, un nouveau Premier ministre plus consensuel que
son prédécesseur, Haïdar al-Abadi, a été nommé le 8 septembre 2014. Issu du
même parti qu’al-Maliki et perçu comme proche du régime iranien, il
continue cependant de cristalliser l’opposition des sunnites. En outre,
l’intervention militaire engagée depuis plusieurs mois par la coalition
internationale ne comporte pas d’offensive terrestre et ne peut se prévaloir
d’autres succès que celui de la libération de Kobané. De l’avis largement
partagé des spécialistes entendus par votre commission d’enquête, aucune
sortie de crise durable ne peut être envisagée en l’absence d’une réflexion
politique profonde sur la place des différentes communautés en Irak, et
notamment sur l’évolution du mode de scrutin confessionnel mis en place à
compter de 2003, qui contribue à opposer entre elles les différentes
communautés irakiennes.
Le conflit syrien a également conduit à l’effondrement du pays
après l’année 2012 et à son déchirement entre les diverses communautés qui
le composent. À partir de mars 2011, la répression sanglante par Bachar alAssad d’un mouvement de contestation – d’abord pacifique − du régime
aboutit à la constitution d’une Armée syrienne libre (ASL). La contestation
dégénère à la fin de l’année en un conflit armé, dans lequel la rébellion
représentée par l’ASL est soutenue et armée par la Ligue arabe et les
principaux pays occidentaux, tandis que Bachar al-Assad reçoit l’aide de
l’Iran et du Hezbollah libanais.
Avec l’afflux de candidats au djihad d’origine étrangère, dont les
objectifs ne correspondent en rien aux buts initiaux d’une ASL rapidement
débordée, la guerre civile évolue en une confrontation religieuse opposant,
d’une part, un front sunnite rigoriste, et, d’autre part, les forces chiites,
alaouites et chrétiennes, soit les minorités du pays.
Cette évolution du conflit brouille le positionnement des différents
acteurs, et notamment le rôle des protagonistes occidentaux. L’aide
militaire fournie par les États-Unis et l’Europe à la rébellion contre Bachar alAssad aurait permis à des groupes djihadistes de récupérer des armes, voire
à de futurs soldats de Daech de recevoir une formation militaire. Au total, il
n’existerait plus aujourd’hui de groupe réellement modéré en Syrie. L’ASL