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Le cadre légal du Patriot Act
Comme l’ont fait apparaître les entretiens menés par la délégation de votre
commission d’enquête s’étant rendue à Washington, en particulier avec des représentants
du département de la justice et du FBI, l’objet principal du Patriot Act, au-delà de ses
aspects les plus controversés 1 comme l’unification du cadre juridique des perquisitions ou
l’utilisation massive des « lettres de sécurité nationale »2 envoyées par le FBI 3, était
« d’abattre ce mur entre les missions de "law enforcement" 4 et de renseignements », ces deux
activités fonctionnant « en silos » avant les attentats du 11 septembre. De l’aveu de ces
personnes, cette réforme, qui a « relié le fil blanc et le fil rouge » pour permettre un plus large
partage d’informations entre ces deux maillons de la chaîne sécuritaire, a permis de rendre
le fonctionnement de l’organisation des services plus efficace dans le domaine du contreterrorisme. Les représentants du FBI ont précisé à votre délégation que l’état de la menace
ne permettait plus à ce service de travailler « dans son coin » et que le renseignement se
situait désormais « à la base de ses activités ». L’objectif du Patriot Act a donc été de donner à
tous les acteurs les mêmes outils, du moins intrusif au plus intrusif 5, dès lors que
l’opération de surveillance fait l’objet d’une autorisation en bonne et due forme respectant
le cadre légal applicable.
Votre commission d’enquête ne saurait préconiser l’importation
dans notre système sécuritaire du Patriot Act pour des raisons tenant tant à la
diversité des cultures juridiques et judicaires qu’aux dérives que ce texte a
pu susciter aux États-Unis. Pour autant, elle considère que les améliorations
apportées en matière de partage de l’information entre la communauté du
renseignement et la « police judiciaire » constitue une piste de réflexion
particulièrement judicieuse qu’il semble opportun d’approfondir dans la
perspective de l’examen du texte sur le renseignement. Cette question
recoupe au demeurant les analyses faites par votre rapporteur sur les
difficultés ayant trait à la judiciarisation des informations obtenues dans des
missions de renseignement. À cet égard, il lui apparaît nécessaire de donner
un statut aux informations collectées dans le cadre du travail des services de
renseignement pour en permettre la judiciarisation.
Proposition n° 25 : Donner un statut légal aux informations collectées dans
le cadre du travail de renseignement.
Le département de la justice fait valoir à cet égard que 90 % des 153 dispositions contenues dans le
Patriot Act étaient en cours de préparation depuis de nombreuses années.
2 La section 505 du Patriot Act autorise le FBI à adresser des injonctions à une personne de produire
des informations non protégées par la Constitution dans le but de prévenir des actes de terrorisme
international ou d’espionnage sur le territoire national. Le Patriot Act a augmenté le nombre
d’agents du FBI autorisés à utiliser cette faculté.
3 Les représentants du département de la justice rencontrés par la délégation ont eux -mêmes reconnu
que cet outil avait été mal utilisé par les forces de police, sous la crainte, apr��s le 11 septembre, de
nouveaux projets d’attentats en préparation. Cette dérive aurait été corrigée suite à des audits
effectués par le Gouvernement américain.
4 Équivalent anglo-saxon de la notion de police judiciaire.
5 Forcer un tiers à fournir des informations, sonoriser un lieu privé, etc.
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