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FILIÈRES « DJIHADISTES » : POUR UNE RÉPONSE GLOBALE ET SANS FAIBLESSE

La philosophie de cette organisation repose sur une large
coopération entre les pouvoirs publics, principalement la police, et les
acteurs de la société civile. Ainsi que cela a déjà été indiqué, la fondation
Quilliam est fortement impliquée dans les programmes de prévention ; outre
ses actions en matière de contre-discours, elle a également développé des
stages de « déradicalisation » à destination des jeunes, qui reposent
également en partie sur l’influence exercée par le témoignage d’anciens
extrémistes repentis.
Si ce programme, qui fait l’objet d’évaluations périodiques, est
régulièrement adapté et reconduit, son efficacité ne fait pas l’unanimité au
Royaume-Uni. Les observateurs relèvent tout d’abord que la démarche,
initiée en 2005, n’a pas permis d’éviter le départ de plusieurs centaines de
citoyens britanniques pour le djihad. Exclusivement centré sur la
communauté musulmane, le programme est par ailleurs suspecté
d’alimenter les tensions communautaires.
 Les Pays-Bas comme le Danemark ont également lancé des
programmes de déradicalisation comparables, qui se distinguent toutefois
du modèle britannique par leur fort ancrage au niveau local.
Aux Pays-Bas, la mobilisation nationale autour d’une stratégie
nationale de contre-terrorisme, à partir de 2007, est née du choc créé par
l’assassinat de Theo van Gogh en 2004 ; plusieurs initiatives avaient
cependant été lancées dès 2005 par quelques grandes villes comme
Rotterdam, Amsterdam ou La Haye. Le modèle d’action hollandais en
matière de déradicalisation repose sur la détection puis la prévention
précoces de la radicalisation, à travers un effort de réintégration des
individus à risque et le développement d’un contre-discours adapté à chaque
situation. La mise en œuvre de ce modèle repose principalement sur les
municipalités, le rôle de l’État se bornant à son financement.
Selon Pierre Conesa, les débuts de ces programmes ont été marqués par
des réticences importantes, notamment de la part des travailleurs sociaux, peu
enclins à mener des actions de détection précoces ; il a ainsi été nécessaire de
conduire en parallèle des programmes de formation des acteurs impliqués. Il est
intéressant de constater que la ville d’Amsterdam distingue entre les individus
radicalisés, pour lesquels la ville applique une action visant à la sortie du
processus, et ceux qui organisent la diffusion de l’idéologie radicale, qui relèvent
de la compétence des services de police et de renseignement.
Il est à noter que le programme d’action publié le 29 août 2014 par le
ministère de la sécurité et de la justice privilégie par ailleurs la collaboration
avec la communauté musulmane, et notamment avec certains « personnagesclés », nationaux ou locaux, prenant publiquement position contre l’idéologie
djihadiste ; ces acteurs se voient accorder un soutien de la part des pouvoirs
publics, qui peut prendre la forme d’une action d’entraînement à la prise de
parole dans les médias, ou, le cas échéant, d’une protection policière.

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