Décisions des juridictions
— le rapport de M. Thiellay, maître des requêtes ;
— les conclusions de M. Lamy, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le garde des Sceaux :
Considérant que l’autorité compétente, saisie d’une demande tendant à
l’abrogation d’un règlement illégal, est tenue d’y déférer, soit que ce règlement ait
été illégal dès la date de sa signature, soit que l’illégalité résulte de circonstances de
droit ou de fait postérieures à cette date ; que M. X a demandé, le 10 janvier 2000,
au garde des Sceaux d’abroger les arrêtés du 18 juin 1986 et du 13 avril 1993 relatifs à la mise en œuvre dans les tribunaux de grande instance d’un système de gestion
automatisée de procédures, notamment pénales ; que M. X conteste la légalité de la
décision de rejet prise par le garde des Sceaux ; que, par suite, le ministre ne peut
utilement soutenir que, les délais de recours pour contester ces arrêtés étant expirés,
la requête serait tardive ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu’aux termes de l’article 15 de la loi no 78-17 du 6 janvier
1978 modifiée : « hormis les cas où ils doivent être autorisés par la loi, les traitements automatisés d’informations nominatives opérés pour le compte de l’État, d’un
établissement public ou d’une collectivité territoriale, ou d’une personne morale de
droit privé gérant un service public, sont décidés par un acte réglementaire pris
après avis motivé de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. / Si
l’avis de la Commission est défavorable, il ne peut être passé outre que par un décret
pris sur avis conforme du Conseil d’État [...] » ;
Considérant que, saisie par le garde des Sceaux, ministre de la Justice, d’un
projet d’arrêté relatif à la mise en œuvre d’un système de gestion automatisée de certaines procédures dans les tribunaux de grande instance, la Commission nationale
de l’informatique et des libertés a, par une délibération no 86-57 du 20 mai 1986,
donné un avis favorable à ce projet sous réserve que les informations relatives à la
gestion des procédures pénales ne soient pas conservées sur support informatique
plus de cinq années à compter du jugement définitif ou de la décision de classement
et que les fichiers du greffe soient mis à jour à la suite des mesures d’amnistie, de réhabilitation ou de grâce ; qu’elle a également indiqué que « les informations relatives à la gestion des affaires relevant des attributions non répressives du parquet ne
devront pas être conservées, sur support informatique, au-delà du temps nécessaire à
l’exercice des contrôles pour lesquels elles ont été enregistrées » ; que le ministre de
la Justice a pris, le 18 juin 1986, un arrêté relatif à la mise en œuvre dans les tribunaux de grande instance d’un système de gestion automatisée des procédures pénales et des affaires relevant des procureurs de la République et, le 13 avril 1993, un
arrêté relatif à la mise en œuvre d’un système comparable pour les procédures pénales relevant des procureurs de la République et des juges d’instruction, les procédures
pénales et civiles des juges des enfants ainsi que les affaires civiles, administratives
et commerciales relevant des procureurs de la République ;
Considérant que les conditions posées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés pour la création, sur la base de l’article 15 de la loi du 6
janvier 1978, d’un traitement automatisé d’informations nominatives, forment un ensemble destiné à garantir que ce traitement satisfait aux exigences de la loi et assure,
de façon satisfaisante, le respect des intérêts que le législateur a entendu protéger ;
qu’il en résulte que l’absence, dans l’acte réglementaire de création d’un traitement
d’informations nominatives, des mesures propres à assurer le respect des conditions
ou réserves figurant dans l’avis préalable de la Commission entache cet acte, dans
son ensemble, d’illégalité ; qu’il est constant que les deux arrêtés dont l’abrogation a
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CNIL 22 rapport d'activité 2001