14 juillet 2018
JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Texte 1 sur 160
3.3.3. Agir dans les nouveaux espaces de confrontation stratégique
Enjeu de rivalité entre grands Etats, l’accès aux nouveaux espaces stratégiques communs ou partagés fait l’objet
d’une compétition, dont l’intensité croît, alors que les règles communes qui les gouvernent sont insuffisantes. La
France devra donc consolider son autonomie stratégique, en s’appuyant sur des capacités spécifiques ou
modernisées, qu’elles relèvent du domaine de la cyberdéfense ou du spatial.
3.3.3.1. Une structuration volontariste de l’action du ministère dans l’espace numérique
Le développement du cyberespace à l’échelle planétaire, la rapidité d’accroissement de la dépendance au
numérique de nos moyens militaires ainsi que l’extension des risques d’attaque sur nos systèmes électroniques,
nécessitent le développement de capacités de cyberdéfense dans toutes leurs dimensions. Transverse aux fonctions
stratégiques qu’elle soutient, la cyberdéfense porte en son sein un enjeu de souveraineté nationale.
S’inscrivant dans la cadre des conclusions de la revue stratégique Cyber, la loi de programmation militaire 20192025 renforce les capacités des armées en matière de prévention, de détection et d’attribution des cyberattaques.
Elle les dote également de moyens de réaction rapides, efficaces et coordonnés à l’horizon 2025 afin de garantir une
protection et une défense de nos systèmes et réseaux, cohérente dans tous les secteurs (cyberprotection, lutte
informatique défensive, influence numérique, lutte informatique offensive et moyens de commandement et
d’entraînement). Elle prévoit en outre des effectifs supplémentaires à hauteur de 1 500 sur la période.
L’effort au profit de la cyberdéfense concernera également la protection des systèmes d’armes et des systèmes
d’information, dès leur phase de conception et pendant leur utilisation. En outre, la posture permanente cyber
(PPC) garantira la surveillance de nos réseaux ainsi que le caractère opérationnel des capacités actives ou passives
de lutte informatique défensive. Pour ce faire, les capacités d’intervention et de détection du centre d’analyse et de
lutte informatique défensive (CALID), des centres opérationnels de sécurité (SOC) des armées, de la 807e
compagnie de transmissions et du centre interarmées des actions sur l’environnement (CIAE) seront renforcées.
En outre, un grand nombre d’unités spécialisées seront regroupées sur le pôle de Rennes.
En matière de lutte informatique offensive, de nouvelles capacités d’action, intégrées à la chaîne de planification
et de conduite des opérations, seront systématiquement déployées en appui de la manœuvre des armées. En effet,
s’appuyant sur la numérisation croissante de nos adversaires, elles offrent des options alternatives ou
complémentaires aux effets des systèmes d’armes conventionnels. Cette période sera aussi mise à profit pour
étudier l’élargissement des contextes opérationnels d’emploi de l’arme cybernétique.
3.3.3.2. Une meilleure prise en compte de l’espace exoatmosphérique
Dans le domaine militaire, le libre accès et l’utilisation de l’espace exoatmosphérique sont des conditions de
notre autonomie stratégique, dans la mesure où les satellites fournissent des services essentiels à la préparation et à
la conduite des opérations militaires, dont les communications, la navigation, la surveillance et l’écoute spatiales.
En outre, l’accès à l’espace, milieu en forte mutation et peu régulé, tend à se banaliser, de même que l’usage de
services spatiaux. A ce titre, l’espace exoatmosphérique présente donc un intérêt stratégique de premier ordre.
La France continuera à appuyer les initiatives européennes en matière de capacités spatiales et s’efforcera
d’inscrire leur développement et leur financement dans le cadre du Fonds européen de défense.
Face à l’accroissement des risques et menaces, le renforcement continu de la protection et de la résilience des
nouveaux moyens spatiaux et des systèmes les utilisant s’impose. La capacité à détecter et attribuer un éventuel
acte suspect, inamical ou agressif dans l’espace constitue donc une condition essentielle de notre protection.
Nos capacités nationales de surveillance de l’espace exoatmosphérique (Space Surveillance and Tracking, SST)
et de connaissance de la situation spatiale (Space Situational Awareness, SSA) seront consolidées, notamment par
le renforcement du Commandement Interarmées de l’Espace et du Commandement de la Défense Aérienne et des
Opérations Aériennes. En outre, les opportunités de développement de coopérations plus étroites avec des
partenaires stratégiques clés seront systématiquement recherchées. A ce titre, la France s’engagera dans le
renforcement de l’initiative européenne de surveillance de l’espace exoatmosphérique pour la faire évoluer en
véritable capacité de connaissance de la situation spatiale couvrant la surveillance des débris spatiaux, la
météorologie spatiale et la protection des satellites notamment face aux menaces cyber.
La France continuera par ailleurs à appuyer le développement du signal crypté du système européen de
positionnement par satellites Galileo (Galileo PRS) et jouera un rôle moteur dans une éventuelle initiative
européenne en matière de communication sécurisée par satellites.
Enfin, les armées étudieront également les voies et moyens d’atténuer les risques associés à notre dépendance à
l’espace exoatmosphérique ainsi que les mesures permettant de limiter cette même dépendance pour les opérations.
Dans cette perspective, elles porteront une attention particulière, notamment dans le cadre de la coopération
européenne, à l’émergence de technologies de rupture comme les « pseudo-satellites de haute altitude » ou dans le
domaine des services en orbite et des lanceurs.
3.4. Innover et se transformer pour répondre aux défis futurs
L’innovation est un levier majeur de la LPM pour garantir l’autonomie stratégique de la France et la supériorité
opérationnelle de nos armées.
En matière d’équipements, un effort accru sera réalisé pour les études, la préparation des programmes
structurants pour l’avenir et le maintien de l’excellence de notre base industrielle et technologique de défense