14 juillet 2018
JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
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Dans le cyberespace, domaine en évolution rapide, les difficultés d’attribution des attaques et les dommages
potentiels sur le fonctionnement des sociétés comme des Etats font de la capacité à agir de manière souveraine dans
l’espace numérique un enjeu prioritaire.
Enfin, le développement de nouvelles formes de conflictualité et de nouveaux modes opératoires fondés sur
l’ambiguïté des intentions, la combinaison de moyens d’actions, militaires ou non, à des fins d’intimidation, de
manipulation de l’opinion publique par l’utilisation massive des médias numériques et des réseaux sociaux avec
pour objectif l’altération du fonctionnement normal des institutions démocratiques, ou de déstabilisation,
impliquent des risques élevés d’escalade en contribuant à alimenter un état de tension endémique qui affecte les
relations entre puissances. Le recours à l’ambiguïté se vérifie également dans le domaine nucléaire : la
modernisation des capacités de plusieurs Etats se double d’un recours croissant à des postures opaques, notamment
en termes de doctrine publique, ou agressives, incluant une dimension de chantage.
Au bilan, ces évolutions de la conflictualité accroissent l’instabilité géopolitique et les risques d’escalade
militaire entre Etats, qui disposent de capacités d’agression nouvelles brouillant, dans le même temps, la perception
de la menace et pouvant conduire à une interprétation ou une évaluation erronées des intentions adverses.
1.2. Une Ambition 2030 pour construire un modèle d’armée
à la hauteur des enjeux stratégiques
Face à la dégradation du contexte géostratégique décrite dans la Revue stratégique, cette dernière préconise le
maintien d’un modèle d’armée complet et équilibré, en mesure de renforcer des aptitudes clés : renseigner et
commander, entrer en premier, combattre et protéger, soutenir et durer. Ce modèle s’appuie également sur des
femmes et des hommes formés, entraînés et valorisés. Il permettra aux armées françaises d’agir sur tout le spectre
des opérations, dans le cadre de coopérations opérationnelles maîtrisées, bilatérales, européennes, transatlantiques
ou en coalition.
1.2.1. Une Ambition pour faire face aux menaces et aux défis futurs
Cette ambition, portée pour nos armées à l’horizon 2030, confère à nos forces une indispensable capacité
d’autonomie stratégique, gage d’indépendance et de crédibilité internationale. Cette autonomie répond ainsi aux
priorités fixées par le Président de la République et permet à la France de répondre aux enjeux auxquels elle aura à
faire face dans les prochaines années.
Par leur simultanéité, leur complexité et leur dispersion géographique, les crises, au titre desquelles les armées
françaises sont actuellement engagées en opération, mettent leurs capacités et leurs ressources sous forte tension.
Ainsi, tout en garantissant la permanence et la sûreté de la dissuasion, elles sont déployées au Sahel dans un cadre
national avec le soutien de nos partenaires, contribuent au Levant à une coalition internationale et participent à la
posture de défense et de dissuasion au profit de nos alliés sur le flanc Est de l’Europe. Elles assurent, dans le même
temps, la défense et la protection du territoire national, de ses approches et de ses approvisionnements par voie
maritime.
Dans les années à venir et d’ici à 2030, les armées continueront à assumer la responsabilité de ces missions
essentiellement pour la protection de la France et des Français, pour celle de l’Europe et des Européens pour
conforter la place de notre pays dans le monde. Elles devront être en mesure de le faire de manière soutenable dans
la durée, c’est-à-dire en maintenant un niveau d’engagement conforme aux contrats opérationnels qui leur sont
fixés, sans dégrader leur capital opérationnel à la fois en termes de ressources humaines et de matériels.
1.2.2. Un socle de capacités opérationnelles fondamentales
Pour cela, l’Ambition 2030 doit, tout d’abord, permettre aux armées de disposer des capacités opérationnelles
indispensables à la garantie de notre souveraineté et de notre autonomie stratégique. Ainsi, la dissuasion demeure
la clé de voûte de notre stratégie de défense. A ce titre, elle continuera de se fonder sur la posture permanente des
deux composantes océanique et aéroportée, renouvelées et modernisées.
Les armées françaises devront, en outre, être capables d’assurer en permanence la défense et la protection du
territoire national et de ses approches, tout en étant en mesure de se déployer en opérations extérieures pour
défendre les intérêts nationaux et les ressortissants, assumer les accords de défense, les engagements et les
responsabilités internationales de la France, notamment celles qui découlent de son statut de membre permanent du
Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations-Unies.
Elles devront conduire ces opérations dans le cadre d’une approche globale élargie, permise notamment par un
dispositif de forces prépositionnées et de forces de souveraineté, toutes deux dotées des effectifs suffisants et des
équipements adéquats, par des relais étendus dans les postes diplomatiques et les organisations internationales
intéressées aux questions de défense et de sécurité. Elles devront enfin disposer des moyens autonomes
d’appréciation de situation, seuls à même de garantir une prise de décision indépendante et souveraine.
1.2.3. Un lien affirmé entre autonomie stratégique nationale
et construction d’une autonomie stratégique européenne
Au-delà de ces capacités fondamentales, qui constituent le socle de notre défense, l’Ambition 2030 définit un
certain nombre de priorités pour les années à venir : accentuer l’effort sur le renseignement, consolider la capacité
des armées à prévenir les crises internationales, renforcer notre présence dans les nouveaux espaces de