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Dans leur ouvrage sur le secret professionnel, maître Floriot
et M. le Conseiller Combaldieu écrivent fort justement à ce sujet :
Ces procédés, qui rappellent ceux du Cabinet noir, sont extrêmement choquants.
Ils ne sont pas utilisés pour découvrir un crime ou un délit, ni pour empêcher une
infraction grave de se commettre, mais pour essayer de tout savoir sur un homme
politique, y compris les secrets de sa vie privée, le plus souvent dans l'espoir de
pouvoir exercer sur lui des pressions qui s'apparentent extrêmement au chantage._ ».
En outre, la réalisation de telles besognes est parfois confiée
à des hommes de main servant des intérêts qui n'osent pas se
manifester au grand jour.
Enfin, si aucune disposition n'est prise, le danger ne pourra
que s'aggraver compte tenu des progrès de la technique qui
permettent un développement rapide des moyens d'organisation et
d'investigation au détriment de la liberté politique et individuelle
des citoyens.
L'utilisation de l'ordinateur a permis récemment d'accroître
les capacités de traitement et de conservation de l'information ou
des renseignements recueillis grâce aux réseaux d'écoute ; de plus,
est apparue depuis quelque temps la possibilité d'empêcher les
communications téléphoniques grâce à un système de blocage
électronique.
En tenant compte également du développement du téléphone
automatique, il n'est nullement déraisonnable d'envisager le moment
où l'ensemble du réseau téléphonique national pourrait être relié
à des centres tels que l'actuel G. I. C.
On mesure ainsi l'étendue d'un péril que l'opinion publique
ne perçoit peut-être pas encore suffisamment, mais qui nécessite
de toute évidence l'élaboration d'un texte de loi destiné à mettre
fin à ces pratiques peu orthodoxes.
III. — Une esquisse de solution juridique.
La commission, en effet, ne peut faire sienne la thèse officielle
selon laquelle le bon usage des écoutes téléphoniques trouve sa
garantie « dans la confiance que, quelles que soient leurs opinions
politiques, les citoyens doivent, dans un Etat démocratique, avoir
à l'égard du Gouvernement » (1). Elle considère, tout au contraire,
que les citoyens, à raison même de la gravité des atteintes susceptibles d'être portées à leur vie privée, professionnelle ou politique,
sont en droit d'exiger que les pouvoirs publics leur assurent une
protection aussi totale que possible, en tout cas plus réelle que celle
11.• Extrait de la déclaration de M. Olivier Stirn au Sénat (séance du 19 juin 1973).